Graphite : la Chine compte sur l’Afrique pour dominer le marché mondial
Malgré ses 80% de la production mondiale de graphite, selon l’Agence internationale de l’Energie (AIE), la Chine entend faire main basse sur la production africaine qui pourrait dépasser la sienne, d’ici 2026, selon Benchmark Mineral Intelligence (BMI).
Par Bilkyss Mentari
L’offensive chinoise en africaine commence début décembre 2024. Avec la cession de son projet de graphite Ancuabe au Mozambique à l’entreprise chinoise Shandong Yulong Gold, l’australien Triton Minerals entérine la volonté de la Chine de contrôler l’exploitation du graphite en Afrique. Une étape importante et stratégique vers sa mainmise définitive sur le marché mondial du graphite, un minerai très demandé dans la production de l’acier.
A la fin de cette transaction en février 2025, Shandong Yulong va détenir 70 % du capital social de ce projet, contre 30 % pour Triton. Ce qui va permettre à la compagnie chinoise de contrôler un actif capable de livrer environ 70.000 tonnes par an de concentré de graphite pendant 27 ans. Au Mozambique, Shandong Yulong retrouve une autre compagnie chinoise, DH Mining Development, qui va lancer fin 2024 la production sur son projet Nipepe d’une capacité de production de 200.000 tonnes de graphite par an sur 25 ans, selon l’association mozambicaine Centro de Integridade Pública.
Les entreprises chinoises atterrissent dans l’exploitation du graphite en Afrique alors que le leadership de la Chine est contesté par les pays africains
Ces présences chinoises dans ce pays d’Afrique du Sud ouvert sur l’Océan indien, et dans d’autres, traduisent l’intérêt croissant de la Chine pour le graphite africain. Elles interviennent au moment où le leadership de l’empire du Milieu est de plus en plus contesté, notamment par les pays africains. En effet, selon Benchmark Mineral Intelligence (BMI), en 2025, le Mozambique, la Tanzanie et Madagascar devraient ainsi représenter 47 % de la nouvelle offre de graphite, cela alors que ces trois pays n’avaient eu qu’une part cumulée de 10% dans l’offre mondiale fin 2023. Cette prévision de BMI montre la forte croissance de la production africaine de graphite. Et ouvre la concurrence aux ambitions chinoises.
Concurrence avantageuse
Selon Benchmark, avec 40% de l’offre mondiale, l’Afrique devrait surpasser la Chine (35%) comme premier producteur mondial de graphite naturel d’ici 2026
Les mauvaises nouvelles s’amoncellent pour la Chine dans le secteur de l’exploitation du graphite en Afrique. En effet, toujours selon Benchmark, avec 40% de l’offre mondiale contre 35% pour la Chine, l’Afrique devrait surpasser la Chine comme premier producteur mondial de graphite naturel d’ici 2026. Dans cette perspective, ces derniers mois, la Corée du Sud et l’Union européenne ont conclu des accords avec les compagnies actives sur des projets de graphite en Afrique. Toutes deux entendent réduire leur dépendance envers la Chine, qui utilise son contrôle du graphite comme une arme dans la guerre commerciale avec les Etats-Unis et autres alliés de Washington. Au final, le continent tire avantage de cette concurrence entre grandes puissances. Elle donne à l’Afrique la possibilité de négocier des accords d’exploitation plus profitables, notamment en ce qui concerne l’installation d’unités de transformation locales de sa production. Pour protéger leur production, certains pays, comme le Ghana et la Namibie ont décidé d’interdire d’exporter à l’état brut les minéraux critiques, dont le graphite.