Rwanda : un hub numérique ?

Mi-juin, Norrsken House, “le plus grand hub technologique en Afrique », implanté dans le centre ville de Kigali, inaugurait ses nouveaux bâtiments. Une extension qui témoigne de l’intérêt, et du succès du concept.

Avec l’accueil de 1 200 entrepreneurs, la Norrsken House Kigali a en effet tenu ses promesses. L’établissement est géré par la fondation suédoise Norrsken, organisme mondial à but non lucratif, fondé en 2016, et dont la vocation est d’aider les entrepreneurs à résoudre les défis du monde. Y compris en Afrique. Et c’est Kigali qu’elle a choisi pour installer son premier hub sur le continent.

Construite en pleine pandémie, sur le site de l’ancienne école belge, elle a démarré ses activités à la fin de l’année 2021. L’établissement se construit autour différents espaces de travail, à la fois ouverts et fermés. Son architecture mêle bois, métaux et végétaux. Une diversité à l’image de ses occupants : des entrepreneurs autant que des investisseurs ainsi que des structures destinées à les accompagner. Au total, cette « house » rassemble une communauté de 1 200 membres. En moins d’un an, le premier hub africain de la fondation Norrsken a ainsi tenu ses promesses : accueillir plus de mille membres.

Le Rwanda s’est avéré être un excellent banc d’essai et nous espérons en faire une passerelle pour ouvrir nos activités à d’autres régions à travers l’Afrique

“Au lancement de Norrsken en 2016, l’objectif était de mettre en lumière les réseaux et les capitaux qui contribuent à la croissance économique et mettre fin aux inégalités dans divers secteurs” rappellait Niklas Adalberth, fondateur de Norrsken et, par ailleurs, à l’origine de la licorne fintech suédoise, Klarna, lors de l’inauguration officielle du site. Convaincu que “l’Afrique a un rôle à jouer dans les principaux défis du monde”, il poursuit : “À Kigali, où nous nous trouvons en ce moment, il y a un environnement propice parce que nous avons accès à un bon café, à une bonne connectivité, et plus d’un millier d’entrepreneurs avec lesquels vous pouvez échanger, interagir, tout en ayant la possibilité d’accéder à des capitaux, soit par les accélérateurs que nous avons ici, dans la maison, soit directement par celui de notre fondation.”

A ce titre, la fondation a investi 205 millions d’euros à destination des entreprises africaines, par le biais du fonds de croissance technologique, Norrsken22. Ce dernier vient de franchir une étape significative en dépassant  l’objectif initial de 200 millions de dollars, pour l’Afrique, lors de la clôture de son premier exercice. Norrsken22 a déjà investi dans cinq entreprises prometteuses : la banque sud-africaine challenger TymeBank, la plateforme de commerce numérique interentreprises Sabi, la solution de vérification d’identité Smile ID et la plateforme de financement automobile Autochek. “Le Rwanda s’est avéré être un excellent banc d’essai et nous espérons en faire une passerelle pour ouvrir nos activités à d’autres régions à travers l’Afrique.”

Au Rwanda, nous offrons un environnement politique et réglementaire très prospectif,  tourné vers l’avenir, en particulier pour les startups, les investisseurs et les innovateurs

Ces ambitions rejoignent celles du Rwanda. Le pays cherche à se positionner comme le hub de l’innovation technologique en Afrique. Cela passe par l’accueil des investissements, une stabilité à toute épreuve et des institutions, telles que Rwanda Finance Limited, à destination de l’Afrique.

“L’Afrique compte plus de 700 centres technologiques actifs, Norrsken House Kigali est l’un d’entre eux” rappelle Paula Ingabire, ministre des TIC et de l’Innovation rwandaise. « Au Rwanda, nous offrons un environnement politique et réglementaire très prospectif,  tourné vers l’avenir, en particulier pour les startups, les investisseurs et les innovateurs. ” Et d’assurer : “Au Rwanda, nous nous engageons, non pas à choisir des gagnants, mais à produire des gagnants.” Avec Norrsken House Kigali comme usine de fabrication de ces futurs champions africains.

La technologie au cœur de son modèle de développement

De fait, le pays, souvent surnommé la « Suisse de l’Afrique » pour son paysage montagneux ou encore de “Singapour de l’Afrique” pour son développement économique rapide, se profile également comme un acteur majeur dans le domaine de la technologie sur le continent africain. Avec une volonté affirmée de placer la technologie au cœur de son modèle de développement, le gouvernement rwandais a lancé une série d’initiatives visant à faire du pays un hub régional de l’innovation.

Au centre de cette stratégie se trouve le projet phare : Kigali Innovation City. Annoncé en 2019, ce projet ambitieux vise à créer un écosystème technologique complet, regroupant des entreprises technologiques, des institutions de recherche, des incubateurs de start-up et des centres de formation, le tout dans un environnement propice à l’innovation et à la collaboration. Avec une superficie de 70 hectares et un investissement de près de 2 milliards de dollars, Kigali Innovation City vise à attirer des entreprises technologiques de premier plan à Kigali et à positionner le Rwanda comme un centre d’excellence technologique en Afrique.

Le site accueille entre autres l’Université Carnegie Mellon Afrique. En 2011, à l’invitation du gouvernement du Rwanda (GoR), Carnegie Mellon et le GoR ont signé un accord pour établir un nouveau site CMU à Kigali, au Rwanda. Ce partenariat ambitieux et innovant a été conçu pour répondre à la pénurie critique de talents en ingénierie de haute qualité, nécessaires pour exploiter l’énorme potentiel de l’Afrique, qui abrite la main-d’œuvre à la croissance la plus rapide au monde.

CMU-Africa, situé à Kigali Innovation City , est un centre régional d’excellence en TIC qui forme une composition diversifiée de futurs dirigeants de toute l’Afrique, qui utiliseront leurs compétences et connaissances pratiques pour faire progresser l’innovation technologique et développer les entreprises.

Dans le domaine de la finance, Rwanda Finance Limited a lancé un fonds de capital-risque dédié à la fintech, visant à soutenir les start-up innovantes dans le secteur financier. Ce fonds, doté de 100 millions de dollars, vise à encourager l’innovation dans les services financiers et à renforcer le rôle du Rwanda en tant que centre financier régional.

Ces initiatives ont déjà commencé à porter leurs fruits, avec une augmentation significative du nombre de start-up technologiques et d’entreprises innovantes établies à Kigali. De plus en plus d’entrepreneurs locaux et internationaux se tournent vers le Rwanda pour développer leurs idées et leurs projets, attirés par un environnement propice à l’innovation, un soutien gouvernemental fort et des infrastructures modernes.

Compétences techniques, financement et inclusivité : les défis du “modèle rwandais”

Cependant, des défis subsistent, notamment en matière de formation et de développement des compétences techniques, d’accès au financement pour les start-up en phase de croissance, et de création d’un écosystème inclusif qui profite à tous les Rwandais. Pour relever ces défis, le gouvernement rwandais travaille en étroite collaboration avec le secteur privé, les institutions académiques et la société civile pour développer des programmes de formation, des incubateurs de start-up et des politiques publiques favorables à l’innovation.

Car si l’écosystème technologique rwandais est en plein essor, avec un réel, potentiel énorme pour devenir un hub régional de l’innovation, il reste devancé par d’autres écosystèmes, plus matures _ si l’on s’en réfère au tryptique requis à savoir les niveaux de compétences disponibles, le tissus d’entreprises technologiques présents et la capacité à mobiliser le financement, en capital-risque notamment_ Accra, Le Caire, Le Cap, Johannesburg, Lagos, Nairobi ou encore Tunis.

En attendant, la digitalisation de l’ensemble des services administratifs, via Irembo, la mise en place des Rwanda Smart Class Room, ou encore la création du C4IR, le Rwanda est en bonne position pour s’imposer comme une plaque tournante de l’innovation et une destination de choix pour les talents technologiques mondiaux. L’une des particularités de Norrsken house : l’établissement héberge des entrepreneurs Ougandais, Kenya ou encore sud-africains preuve de son attractivité qui dépasse largement les frontières du “petit pays”.

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