Rita Hadjioui : l’entrepreneuriat écoresponsable

Rita Hadjioui incarne l’audace et l’engagement en faveur d’une mode plus durable. Co-fondatrice de BEHAV aux côtés de Hind Benchaaboun, elle s’est donnée pour mission de révolutionner le sourcing textile en France et en Europe, tout en contribuant au développement socio-économique du Maroc. Là où commence son histoire… “Je suis née à Rabat, j’ai vécu ma petite enfance à Fès et j’ai grandi à Casablanca où j’ai vécu jusqu’à mes 18 ans. J’ai commencé mes études au Maroc avant de rejoindre la France pour intégrer un Programme Grande Ecole spécialisé en Finance d’entreprise. J’ai commencé ma carrière à Paris en tant que contrôleur de gestion dans l’automobile, puis dans le luxe accessible. J’ai donc travaillé pendant plus de 5 ans en finance et le déclic s’est fait finalement post-covid où je me suis posée la question de mon impact”.

La pandémie du Covid-19 aura été le catalyseur de sa réorientation professionnelle. Confrontée à la nécessité de repenser son impact sur le monde, elle décide de faire un virage radical vers l’entrepreneuriat, aux côtés de son amie d’enfance Hind.” Désireuse de renouer avec mes racines franco-marocaines et de faire une différence dans l’industrie du textile qui est l’industrie familiale puisque mon grand-père avait des usines de tissage à Fès, j’ai décidé de dire non à de très belles opportunités d’évolution à Paris et à NYC, et de lancer un projet avec Hind Benchaaboun, amie d’enfance, ingénieure et dont l’histoire personnelle fait beaucoup écho à la mienne. Alignées sur les mêmes valeurs, décidées à faire partie des acteurs du changement, nous avons lancé BEHAV pour répondre à ce besoin.”

Leur projet, BEHAV, est bien plus qu’une simple start-up. C’est une réponse à un besoin urgent : celui d’un sourcing textile respectueux de l’environnement et des communautés locales. En s’appuyant sur leurs racines franco-marocaines et leur expérience dans le monde de la mode, Rita et Hind ont identifié une lacune majeure : le manque d’alternatives écoresponsables dans l’industrie textile européenne.

“Avec mon associée, nous avons ainsi identifié une problématique majeure : la pollution causée par les matières premières, qui représente entre 50 et 70% de l’impact environnemental des articles vendus dans le secteur du cuir. Ce constat a été le point de départ de notre démarche de recherche et de développement pour développer une alternative végétale au cuir et au simili cuir à base de cactus issus de l’agriculture marocaine, entièrement traçable, à fort impact social et à faible impact environnemental.”

Ainsi est né BEHAV, avec pour mission de réduire l’empreinte écologique de l’industrie de la mode. Leur approche novatrice repose sur l’utilisation de matières premières durables, en particulier le cactus, abondant au Maroc. Ce dernier est transformé en un matériau textile innovant, offrant une alternative végétale au cuir et au simili cuir, tout en préservant l’environnement et en soutenant les communautés agricoles locales.

“Aujourd’hui, BEHAV est une start-up à vocation industrielle dans la production de matériaux textiles innovants. L’idée étant de produire notre matériau en France avec une unité de production en propre et d’avoir un impact au Maroc grâce à nos partenariats avec des coopératives agricoles et des coopératives féminines. Nous créons un revenu complémentaire pour les agriculteurs avec la valorisation d’un cactus qui ne l’était pas avant, et pour des femmes issues des milieux ruraux en travaillant avec des coopératives féminines pour l’extraction et le traitement de cette plante. Nous participons finalement à la mise en place d’un nouveau sourcing écoresponsable entre le Maroc et la France / l’Afrique et l’Europe, tout en aidant au renforcement des compétences au Maroc et à la création de solutions adaptées à notre réalité et à notre vision de l’entrepreneuriat à impact en 2023-2024.”

L’engagement de Rita va bien au-delà de son entreprise. En tant qu’entrepreneuse franco-marocaine, elle s’est engagée activement auprès de Je m’engage pour l’Afrique (JMA), une initiative visant à repenser les politiques publiques en faveur du développement du continent. Sa participation aux conversations citoyennes de Lille témoigne de son dévouement envers un entrepreneuriat à impact, axé sur la justice sociale, la gouvernance et la transparence.

“C’est dans ce contexte que j’ai rencontré Leana Santos, co-fondatrice de Je m’engage pour l’Afrique – JMA dans le but de m’impliquer auprès d’autres jeunes leaders africains de la diaspora pour échanger et repenser les politiques publiques liées aux enjeux clés du développement du continent.

Cet engagement a été matérialisé le 2 février avec ma participation aux conversations citoyennes de Lille où je suis intervenue aux côtés de Stéphanie Rivoal, ancienne ambassadrice de France en Ouganda, Cheikh Omar Tall, porte-parole des projets Tilenga pour TotalEnergies, et Loïc Ouattara co-fondateur de Djoba Cash dans une table ronde modérée par Jeimila Donty, fondatrice de Koraï, pour définir ensemble ce que pourrait être en Afrique un Business Act for Democracy.”

“Il était crucial pour moi de mettre en lumière le rôle essentiel des modèles entrepreneuriaux axés sur l’impact dans la promotion de la justice sociale, de la gouvernance et de la transparence. Il semblait également indispensable de souligner pour l’auditoire et le panel que lancer une start-up en 2023-2024 offre une opportunité de créer une entreprise dans l’économie de demain, en concevant son business model en harmonie avec ces valeurs. S’engager pleinement dans un impact global, couvrant les aspects environnementaux, sociaux et sociétaux, n’est plus simplement une option, mais une exigence du marché, soutenue par les investisseurs, le cadre législatif et les partenaires et je souhaitais porter ce message même si ce n’était pas forcément en phase avec toutes les interventions.”

Pour Rita et son équipe, l’avenir s’annonce prometteur. Avec des projets ambitieux de commercialisation et d’industrialisation de leur matériau innovant, ils prévoient de renforcer les compétences locales au Maroc et de créer des opportunités d’emploi pour les femmes des milieux ruraux. Leur vision d’un sourcing écoresponsable entre le Maroc et l’Europe reflète un engagement profond envers un modèle économique durable et inclusif. “Notre roadmap est ambitieuse pour les deux ans à venir. Nous avons pour projet de commercialiser notre matériau d’ici fin d’année 2024 et d’avoir la capacité de l’industrialiser en interne à partir de fin d’année 2025. Cela implique une levée de fonds prévue sur le premier trimestre de l’année prochaine pour financer notre industrialisation en Hauts-de-France, mais aussi d’avoir près de 90 femmes qui travaillent sur le projet BEHAV au Maroc dans les 24 prochains mois. Un programme chargé mais atteignable et nous sommes heureuses de pouvoir compter sur tous nos partenaires français et marocains dans cette aventure !”