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Tunisie Un forum pour retrouver son africanité

Toujours en phase de construction post-révolutionnaire, la Tunisie cherche son identité. Longtemps tounée vers le nord, aujourd’hui elle s’oriente, enfin, vers son continent. Avec humilité mais conviction. Celle de partager le savoir-faire acquis par son secteur privé dans les secteurs de l’éducation, la santé, le BTP ou encore l’éducation. C’était tout l’ambition  de la première édition du Forum Economique Africain qui se tenait à Tunis les  24 et 25 avril.

Par Dounia Ben Mohamed, en direct de Tunis

« Ce forum est l’occasion pour la Tunisie de renouer avec son Africanité trop longtemps délaissée dans le cadre d’un codéveloppement. » Ces propos, exprimés par Omar Behi, Ministre du commerce et de l’industrie tunisien, en marge de la première édition du Forum Economique Africain qui se tenait à Tunis les  24 et 25 avril, résume toute l’ambition de ce RDV.

Organisé, sans protocole ni faste, même s’il était hébergé par le tout juste inauguré hôtel Laico de Tunis, l’évènement porté par le Ministère du Commerce tunisien, se voulait être une rencontre entre le « secteur privé tunisien et les acteurs décisionnels du continent » toujours selon le ministre. Car si des opérateurs tunisiens, pionniers, n’ont pas attendus leurs responsables gouvernementaux pour prendre le chemin de l’Afrique_tel Soroubat, Lilas, Poulina, et autres_ l’expertise tunisienne reste méconnue. Et dans une Tunisie post-révolutionnaire, plus que jamais en quête de son identité et de construction de son modèle de société, l’Afrique devient, ou redevient faudrait-il rappeler, un axe privilégié.

A travers 5 workshops sectoriels _les BTP & services d’ingénierie, les TICs, l’enseignement supérieur, l’agro-alimentaire, la santé, autrement dit les secteurs où la Tunisie affiche une certaine expertise à partager avec ses pairs africains_ les ministres tunisiens concernés mais surtout les acteurs du secteur privé ont exposé aux participants, 150 personnalités du continent et plus de 500 tunisiens selon les organisateurs, le savoir-faire made in Tunisia.

« Les étrangers investissent chez nous alors que nos riches investissent ailleurs. Le jour où nous verrons les Beninois considérer les sociétés tunisiennes comme des entreprises locales, nous aurons franchi un cap important. »

 

Une « rencontre sans pudeur » ainsi que l’aura exprimé Khaled Igue, Béninois président du think thank Club 2030 Afrique qui invite à mobiliser les leaders africains autour du leitmotiv « des solutions africaines aux problèmes de l’Afrique ». « Nous, Africains, avons beaucoup de chance. La globalisaton nous ne l’avons pas décidé mais finalement nous l’avons bien accepté, révélant une forme de résilience. Sans repli sur soi alors que l’Europe est en proie à la montée des extrêmistes, soulignera-t-il. Aujourd’hui, nous, Africains, pouvons être plus compétitifs. En commençant par instaurer la confiance des Africains en l’Afrique. Il y a une fuite des financements et de cerveaux enormes. Les étrangers investissent chez nous alors que nos riches investissent ailleurs. Le jour où nous verrons les Beninois considérer les sociétés tunisiennes comme des entreprises locales, nous aurons franchi un cap important dans ce sens. »

Son voisin, le Sénégalais Moustapha Sow, PDG de SF Capital, ira plus loin encore. « Aujourd’hui si on veut entrer en compétition avec les Turcs, les Chinois, et les autres sur certains types de projets, nous devons penser autrement. » S’appuyant sur son expérience à la Banque islamique de développement, il poursuit :  » La BID compte un département qui finance les projets en Afrique mais ils sont peu utilisés par les Africains contrairement aux Européens qui font appel à ces outils. Il y a un manque de connaissance des moyens de financement qui existent pourtant. » Et invitant ses homologues tunisiens à investir en Afrique, il leur préconise :  « Quand vous voulez aller dans un pays, essayer de trouver une entreprise locale partenaire. L’Afrique qui s’intègre sera alors une réalité. »

« Tout le monde regarde vers l’Afrique alors que, il est vrai, nous ne l’a regardons pas assez ou comme il le faudrait »

« Tout le monde regarde vers l’Afrique alors que, il est vrai, nous ne l’a regardons pas assez ou comme il le faudrait, admet le ministre du commerce tunisien. Les entreprises étrangères se bousculent sur le continent et nous?  » Annonçant à cette occasion l’ouverture d’une ligne maritime Tunis-Dakar-Abidjan-Accra dès le 04 juin 2018, et saluant la participation de 7 pays à la construction de la route transsharienne et les bailleurs de fond qui les ont soutenus, il invite à « changer notre façon de travailler. Les entreprises du monde entier quand elles viennent travailler en Tunisie ou en Afrique, se mettent en consortium avec des sociétés locales. Nous n’avons pas encore l’habitude de travailler ensemble. Pour ce faire, on doit apprendre à se faire confiance, confiance en nos compétences, nos entreprises, nos bureaux d’études… Et nous, le politique, nous devons soutenir nos entreprises pour que les règles de passation  de marché public soient respectées. Et construire l’Afrique de demain de nos mains. »

Les RDV BtoB qui se sont tenues en marge de l’évènement auront sans aucun doute participé à nouer des liens entre acteurs tunisiens et subsahariens. Et ce forum aura ainsi atteint l’un des premiers objectifs fixés à en croire Radhi Meddeb, Commissaire Général du Forum Économique Africain.  » Personnellement, en tant que Commissaire Générale de ce forum, je peux vous dire que nous avons été au-delà des objectifs assignés à la manifestation. Nous avions engagé ce travail dans un delais court, sans les moyens dédiés à des manifestatons équivalentes, et je trouve que le résultat est plus qu’honorable, en terme de présence internationale, mais aussi nationale, en terme de qualité des débats et des moderateurs, des recommandations issues de ce forum. Beaucoup de personnes sont venues nous féliciter à la fin, pour exprimer leur satisfaction , et  finalement c’est le meilleur barometre pour juger de la réussite, ou pas, d’une manifestation.  Nous ne sommes pas dans l’auto-satifaction, nous sommes  conscients des insuffisances qu’il a pu y avoir, au niveau de l’organisation notamment, de la nécessité de toucher un auditoire plus large… Nous allons continuer dans les semaines à venir à tirer les conclusions de façon à operationnaliser les recommandations pertinentes et dans un moyen terme à travailler pour faire que cette manifestation ne soit pas une exception mais devienne une habitude. »

Une mission des acteurs tunisiens de la santé en Côte d’Ivoire en juin prochain

Si l’absence du Premier ministre tunisien à la séance d’ouverture aura été remarquée, l’accessibilité et l’humilité des ministres présents aura effectivement été apprécié, ajouté à l’expertise des opérateurs économiques tunisiens déjà présents en Afrique qui ont fait la qualité de la rencontre. En attendant une seconde édition, pour laquelle nombre de participants ont plaidé, une « caravane » d’acteurs tunisiens du secteur de la santé se rendra à Abidjan en juin. L’ocassion de poser les jalons d’une réelle coopération sud-sud dans un secteur au coeur des défis du continent.

Pour en savoir plus : Table ronde Santé Vers de nouveaux modèles ?

https://www.facebook.com/minist.commerce/videos/1818384078230870/?t=0

 

Par Dounia Ben Mohamed, en direct de Tunis

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