Parcours : Murena Emmanuel Netshitangani, l’étoile montante du cinéma africain primée à Cannes

Né à Ha-Khakhu Makuleni, près du lac mystique Fundudzi dans le district de Vhembe, Murena Emmanuel Netshitangani a grandi au cœur de la culture venda. Dès son plus jeune âge, il est bercé par les récits ancestraux, les rituels et les chants traditionnels de son peuple. Conscient de la fragilité de ce patrimoine oral, il décide de le préserver et de le réinventer à travers le cinéma.

Un conteur enraciné dans la terre du Limpopo

Diplômé de la Tshwane University of Technology en production cinématographique, Netshitangani se distingue rapidement par son approche sensible et poétique de la narration. Après plusieurs courts métrages remarqués, il entreprend l’ambitieux projet de Lubunyu, un long métrage tourné entièrement en langue venda, avec des acteurs non professionnels issus de sa communauté.

Lubunyu : une ode à la mémoire et à la terre

Lubunyu, qui signifie « intrus nu » en langue venda, est inspiré d’un souvenir d’enfance marquant : « Il y avait une figure mystérieuse connue sous le nom de Lubunyu qui terrorisait les femmes de la région. Une nuit, ma sœur Tshifaro et moi avons rencontré un homme nu et effrayant. Ce souvenir m’a hanté et j’ai ressenti le besoin de le transformer en une narration puissante. »

Le film explore les liens profonds entre la terre, l’identité et la mémoire collective, à travers l’histoire de Thandeka, une jeune fille qui retourne dans son village natal après la mort mystérieuse de sa grand-mère, une guérisseuse traditionnelle. En fouillant le passé, elle redécouvre les secrets de sa lignée, confrontée aux bouleversements modernes et à la perte des savoirs ancestraux.

Mêlant réalisme magique, images oniriques et traditions orales, Lubunyu est une œuvre profondément ancrée dans la culture sud-africaine mais universelle par son propos. La beauté des paysages du Limpopo, filmés avec une sensibilité rare, et l’authenticité des personnages confèrent à ce film une puissance émotionnelle saluée par la critique.

Une œuvre cinématographique d’une rare beauté, qui honore les racines africaines tout en explorant les défis contemporains avec finesse

Présenté au Festival Mondial du Film de Cannes en mai 2025, Lubunyu a été acclamé pour sa fraîcheur, son originalité et sa capacité à faire dialoguer tradition et modernité. Le jury lui a décerné le Prix du Meilleur Film Africain, soulignant « une œuvre cinématographique d’une rare beauté, qui honore les racines africaines tout en explorant les défis contemporains avec finesse ».

Cette distinction place Murena Emmanuel Netshitangani parmi les cinéastes les plus prometteurs du continent. Elle souligne aussi le renouveau du cinéma sud-africain, porté par une jeune génération qui revendique fièrement ses héritages culturels tout en adoptant des langages cinématographiques audacieux.

Dans une publication après sa victoire, il a écrit, avec émotion :« Depuis les montagnes intemporelles de Makuleni, surplombant le lac enchanteur Fundudzi… un nom qui résonne désormais à travers le monde.

Un studio de production au Limpopo pour former de jeunes talents issus de communautés rurales

Murena ne considère pas le cinéma comme une simple carrière, mais comme une mission culturelle. Il œuvre à créer un studio de production au Limpopo pour former de jeunes talents issus de communautés rurales, leur permettant d’avoir accès à des outils professionnels pour exprimer leur vision.

Son projet dépasse le cadre artistique : il s’inscrit dans une démarche de développement communautaire et de préservation du patrimoine immatériel. En ce sens, il rejoint les voix contemporaines d’un cinéma africain engagé, enraciné, et profondément humaniste.

Fort de ce succès à Cannes, Murena Emmanuel Netshitangani a été sollicité par plusieurs festivals internationaux et plateformes de diffusion. Il travaille actuellement sur un nouveau film, centré sur les migrations internes en Afrique australe, tout en poursuivant ses actions de mentorat dans sa région natale.