Hasna Kourda, CEO Save Your Wardrobe : “Avec ce prix LVMH j’espère faire rayonner la Tunisie dans le monde de la mode”
Six années après avoir lancé sa plateforme au Royaume Uni, “Save Your Wardrobe” qui donne une seconde vie aux vêtements dans un parcours circulaire, la Tunisienne Hasna Kourda a reçu le prestigieux prix LVMH de l’innovation.
Par Mérième Alaoui
Littéralement son projet est de “Sauver votre garde robe”. Avec les derniers outils des nouvelles technologies, Hasna Kourda, CEO, propose de constituer sa garde de robe virtuelle, et d’y associer tous les acteurs locaux, régionaux qui permettent sa durabilité. “Dans une logique de mode circulaire, nous connectons les spécialistes de solutions de réparation et d’entretien dans notre plateforme technologique. Nous partons du conseil en boutique, de l’expérience après achat, au tri en passant par l’atelier de réparation mais sans oublier la logistique jusqu’au retail… Et pour cela, nous avons le soutien de grandes maisons de luxe partenaires, d’un des plus grands groupes au monde” se réjouit la Tunisienne après avoir reçu le prix “Innovations awards” à Paris, des mains de Bernard Arnaud, PDG de LVMH.
Le groupe français, numéro un mondial du luxe (79,2 milliards CA en 2022) rassemble aussi bien Dior, Louis Vuitton que Fendi ou Guerlain, soit 75 marques. En plus de la mise sous projecteur, ce prix permet à la startup d’intégrer “La maison des startups LVMH” de la station F qui offre un coaching individualisé avec un accompagnement par des experts, des workshops pour se familiariser avec les enjeux du luxe.
J’ai été marquée par la frénésie commerciale de mes copines. Je voyais les gens acheter et jeter avec des comportements de consommation démesurés
Si la startup est née il y a 6 ans, l’idée est dans la tête de la Tunisienne dès son arrivée en France pour ses études supérieures au début des années 2000, en plein essor de la fast fashion. “J’ai été marquée par la frénésie commerciale de mes copines. Je voyais les gens acheter et jeter avec des comportements de consommation démesurés”. Une attitude qui détonne avec l’éducation qu’elle a reçue. “Je viens de Djerba, cette si belle île dont les habitants sont connus pour une certaine frugalité avec nos ressources. Ma grand-mère nous a appris le bon usage des choses, d’en connaître le prix et les vertus, de les réparer dans une logique circulaire”. Cela conjugué à une passion de la mode et une sensibilité à l’écologie. “Mon éducation, ce sont aussi des valeurs de respect de ressources de la planète dont il faut prendre soin car elles sont finies.”
A Paris, Hasna Kourda s’inscrit en classe prépa, puis en école de commerce “et j’ai même rajouté un peu de Paris Dauphine dans le mixte, sourit-elle. Très vite, l’idée est venue car je voyais qu’il y avait des problématiques à résoudre via l’adoption de la technologie par une industrie connue pour vendre des émotions”.
La Tunisie est un port central car la manufacture est une grande partie de notre PIB. Je me suis toujours dit qu’il fallait que je contribue à l’économie de mon pays
Dès le départ, l’entrepreneuse a toujours voulu développer son entreprise en Tunsie. “C’est même mon objectif. La Tunisie est un port central car la manufacture est une grande partie de notre PIB. Je me suis toujours dit qu’il fallait que je contribue à l’économie de mon pays. ” souligne-t-elle. Mais la révolution puis la Covid ont transformé ses plans. Hébergée une année lors de la première cohorte de Meet africa (Expertise France), les liens avec l’écosystème tech tunisiens restent très forts.
Parmi la quarantaine de techniciens qui constituent le plus gros de son équipe, une trentaine est basée en Tunisie. “L’important est deformer les talents de demain. Aujourd’hui, on nous les arrache par des géants comme Amazon, Google, Méta… On doit pouvoir continuer à travailler avec des techniciens tunisiens, en Tunisie”. Et de conclure : “Avec ce prix LVMH j’espère faire rayonner la Tunisie dans le monde de la mode.”