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Côte d’Ivoire : Les producteurs agricoles développent la résilience

La crise militaro-civile de près d’une décennie et les enjeux climatiques poussent les producteurs agricoles ivoiriens à développer « la résilience. » La BAD organisait les 10 et 11 Janvier le premier forum africain sur le thème, et ce pour les accompagner dans ces nouveaux défis de production.

Quand la crise militaro-civile survient le 19 septembre 2002, les producteurs de café et de cacao, de la région de Man sont désemparés. Leur région est occupée par une branche de la rébellion armée qui s’empare des produits. Dix ans plus tard, si tout n’est plus à reconstruire, les producteurs cherchent à mieux gouverner leur outil pour faire face à de nouveaux défis.

Se fédérer en association

Obed Blondé Doua, président du syndicat des travailleurs agricoles de Côte d’Ivoire (Synttaci) se souvient que « quand la crise s’est déclenchée, l’administration est partie de la région. Les nouveaux responsables, les rebelles, ne songeaient qu’à récupérer la production sans toutefois avoir un plan pour l’appuyer. »

Il s’est alors agi pour le président du syndicat de regrouper les professionnels autour « d’une fédération comprenant 21 associations sous-préfectorales et 16 103 producteurs » mais surtout d’assurer les revenus du secteur : « nous recherchions à ce moment-là un acheteur agréé. Nous avons fait du lobbying et obtenu des rebelles à travers le secrétaire à l’économie, Moussa Dosso, des véhicules de ramassage. »

Améliorer la gouvernance

Pour les participants au forum, la résilience est d’abord liée aux enjeux politiques et démocratiques du continent. En d’autres termes, inutile de parler de résilience en l’absence de sécurité, comme l’explique Cheick Tidiane Gadio, ex-ministre des Affaires Etrangères du Sénégal : « On ne peut pas déconnecter le combat de l’Afrique – pour aller de la résilience à la prospérité – de la situation sécuritaire qui s’est compliquée dans le continent. »

Mamadou Traoré, ex-DG de l’Institut national de formation sociale, va plus loin en formulant l’exigence d’une « bonne gouvernance pour endiguer ces maux. » Pour l’ex-DG, à présent enseignant, « si la démocratie  s’est imposée  à  nous, la bonne gouvernance  devrait l’être également, et je pense que la résilience c’est l’adoption de la politique de la bonne gouvernance. »

S’adapter au milieu

« Le monde rural ivoirien est constamment confronté à des situations difficiles qui sont souvent source de stress. Il y a la baisse continue des prix à l’exportation, les conflits fonciers et les effets climatiques. Face à toutes ces situations, les populations développent une résilience qui leur permet de rebondir » analyse Simplice Yao KOFFI, Spécialiste en Espace rural et aménagement du territoire, et vice-doyen de l’UFR de Sciences Sociales de l’Université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo (Côte d’Ivoire).

Pour l’universitaire, la résilience est donc une question d’adaptation aux conditions climatiques, écologiques et spéculatives. Ses travaux de recherche montrent que « les exploitants agricoles réagissent en fonction des potentialités naturelles de leur zone d’implantation. » Et cela permet d’en déduire quelques bonnes pratiques, telles que « remplacer la spéculation dont le prix baisse par une autre plus rentable ;  s’orienter vers les vivriers pour compenser le manque à gagner ; chercher des solutions alternatives avec par exemple l’anacarde dans les régions de savane. »

Innover, planter, partager 

Si l’adoption de nouvelles variétés agricoles permet à la fois de s’adapter aux contraintes spéculatives et climatiques, le dernier défi des producteurs reste le problème des terres.

« Pour faire face aux problèmes fonciers récurrents, nous avons observé que les communautés rurales mettent, désormais, en place des nouveaux modes d’accès à la terre qui diffèrent d’une région à une autre. Mais, l’idée maîtresse de cette mutation foncière est la location partagée des terres. » Cette innovation, communément appelée le « planter-partager » est, pour le vice-doyen de l’UFR des Sciences Sociales, un chemin à explorer pour le secteur agricole ivoirien.


 

Auteur Issiaka N’GUESSAN // Photo : Forum de la BAD pour la résilience – © Issiaka N’Guessan

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