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Cinémas d´Afrique, à quand la fin des « vieux » problèmes ?

Les mois de janvier et février demeurent comme les plus décisifs dans la découverte des films dits d´Afrique – qui, malgré une visibilité internationale, continuent d’achopper sur les mêmes problèmes : un financement largement dépendant du Nord et une diffusion continentale à réorganiser.

 

Des succès internationaux

Sundance Film Festival aux USA – le festival de prestige qui prône l´indépendance, la créativité et la prise de risque, reconnu pour ses découvertes des talents émergents et pour leur mise en relation avec le public américain – déroule le tapis rouge pour la 1ère mondiale du film «The Wound », du Sud-africain John Trengove, dès ce mois de janvier. Un festival qui a déjà accueilli  des nombreux talents comme le Rwandais Kivu avec son film « Things of the Aimless Wanderer » en 2015.

 

L´Europe quant à elle – lors de la Berlinale, en Allemagne, qui reste l´un des plus grands festivals au monde – livre une grande plateforme pour les nouvelles productions africaines avec, entre autres, « Le corps étranger » de la tunisienne Raja Amari, « Mama Colonel »  du congolais Dieudo Hamadi, ou encore « Félicité » du réalisateur sénégalais Alain Gomis (en compétition internationale). Une fois de plus, la Berlinale montre à sa manière les pépites du cinéma africain, et ce sans tenir compte des segmentations du type « Afriques francophones, anglophones et lusophones. »

 

Des problèmes panafricains

Le Festival Panafricain de cinéma et de télévision de Ouagadougou (FESPACO) – qui a lieu  du 25 février au 4 mars au Burkina Faso ; biennale du cinéma africain ; véritable vitrine de la production panafricaine et de sa diaspora – aurait reçu plus de 1000 films  dont 150 y seront montrés pour sa nouvelle édition. Ce volume démontre le dynamisme de la production cinématographique panafricaine, et explique en partie sa visibilité sur les grands festivals internationaux, mais les mêmes grands problèmes demeurent : les financements nationaux et la diffusion sur le continent.

 

Du film « Félicité » de Alain Gomis  à celui du congolais Dieudo Hamadi, malgré le talent et la célébrité de ces réalisateurs, l´obligation de recourir aux financements des pays du nord fut la seule possibilité  pour réaliser  leurs projets. Si le Sénégal à travers  son fond FOPICA (Fonds de Promotion de l’Industrie Cinématographique et Audiovisuelle) et la Côte d´ivoire – qui a récemment instauré le Fonds de Soutien aux Initiatives Cinématographiques (FONSIC) – tentent de faciliter les productions  cinématographiques de leurs pays, nombreux sont encore ceux en Afrique et surtout au Sud du Sahara à être à la traine. Des initiatives salutaires, sur un plan continental enlisé dans des querelles et des divisions internes, peinent à se mettre en place. Les productions cinématographiques, à succès ou en tout genre, restent donc des coproductions avec une grande subvention des pays du nord.

 

Réinventer la diffusion

Si les coproductions internationales facilitent bien la production des films d´Afrique, elles  sont aussi des gages pour leur visibilité dans les grands festivals du monde. Mais leur visibilité sur le continent est parfois ignorée, ou même bafouée. Malgré les nombreuses tentatives d´organisations continentales et les multiples initiatives privées – soit pour restaurer ou créer des salles de cinéma, soit pour des projections en plein air – voir des films africains sur le continent demeure toujours difficile en dehors des festivals.

 

Avec l´explosion des smartphones, des tablettes et des ordinateurs, nombreuses sont les plateformes Internet qui tentent aujourd’hui de remédier à ce « vieux problème » – et y détectent un véritable marché – mais elles butent pour le moment sur la précarité de la connexion internet pour le continent.

 

*Alex Moussa Sawadogo est le directeur artistique de Afrikamera (festival de film d’Afrique de Berlin) et de Ouaga Film Lab au Burkina. Il est consultant et programmateur Cinéma dans de nombreux festivals en Europe et en Afrique. 


 

 

Auteur: Alex Moussa Sawadogo // Photo: Alex Moussa Sawadogo – © Alex Moussa Sawadogo 

 

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