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TICAD 9 : l’Afrique trace sa propre voie dans le partenariat Japon-Afrique

À Yokohama, la 9e Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD 9) a réuni, du 27 au 29 août 2025, dirigeants africains et japonais autour d’un mot d’ordre : la “co-création”. Derrière les annonces spectaculaires – 5,5 milliards de dollars d’investissements, formation en intelligence artificielle pour 300 000 Africains, soutien à la santé et au commerce – se dessine une nouvelle réalité : l’Afrique entend désormais peser dans la définition des priorités, imposant sa souveraineté et ses propres stratégies de développement.

Dans le centre de conférences Pacifico de Yokohama, le thème de cette édition, « Co-créer des solutions innovantes avec l’Afrique », a été repris par les dirigeants africains et japonais tout au long du sommet. Le Premier ministre japonais, Shigeru Ishiba, a souligné l’importance d’un partenariat fondé sur l’innovation et la coopération mutuelle : « Le Japon croit depuis toujours en l’avenir de l’Afrique. Des solutions enracinées localement sont essentielles pour son développement ».

Le Japon croit depuis toujours en l’avenir de l’Afrique. Des solutions enracinées localement sont essentielles pour son développement

@Prime Minister’s Office – Japan

Sur le plan concret, le Japon a annoncé plusieurs mesures destinées à renforcer sa coopération avec le continent. Parmi celles-ci figurent 5,5 milliards de dollars de financements et prêts, dont 1,5 milliard via la Japan International Cooperation Agency (JICA), ciblant la formation en intelligence artificielle pour 300 000 Africains, le soutien aux infrastructures sanitaires et éducatives, ainsi que le développement du commerce et de l’investissement. Ces annonces reflètent une approche moins centrée sur l’aide traditionnelle et plus orientée vers des projets concrets et l’intégration des entreprises japonaises et africaines dans des partenariats durables.

Ces engagements illustrent une reconfiguration de la stratégie japonaise en Afrique. Au lieu d’un soutien verticalement imposé, Tokyo privilégie désormais la co-création, l’implication du secteur privé et l’accompagnement des politiques africaines. Depuis la première TICAD en 1993, le Japon a investi environ 30 milliards de dollars sur le continent, dans les infrastructures, l’éducation, la santé et l’agriculture, et a vu ses échanges commerciaux avec l’Afrique atteindre 37 milliards de dollars en 2024, faisant de lui un partenaire historique mais désormais plus attentif aux priorités locales.

L’Afrique a besoin de mécanismes qui nous permettent de mettre en œuvre des projets transformateurs sans compromettre notre souveraineté

Du côté africain, le sommet a été l’occasion de réaffirmer la volonté de défendre la souveraineté et de promouvoir des stratégies endogènes. Le président angolais João Lourenço, alors président en exercice de l’Union africaine, a insisté : « L’Afrique a besoin de mécanismes qui nous permettent de mettre en œuvre des projets transformateurs sans compromettre notre souveraineté ». Pour Mahmoud Ali Youssouf, président de la Commission de l’UA, « le secteur privé est le moteur indispensable de la croissance inclusive et du développement durable en Afrique ».

On entend beaucoup parler de ‘co-création’, mais où est le véritable transfert de technologie ?

@Ministry of Foreign Affairs of Japan

Les acteurs économiques africains présents à Yokohama ont également exprimé leurs attentes. Naomi Mbakam, entrepreneure camerounaise fondatrice de Leelou Baby Food, a rappelé : « On entend beaucoup parler de ‘co-création’, mais où est le véritable transfert de technologie ? ». Tunde Olatunji, spécialiste fintech, a souligné l’importance de combiner le mentorat japonais avec l’innovation locale pour renforcer la portée globale des startups africaines.

Annoncé comme “historique”, la TICAD 9 illustre un changement d’équilibre dans les relations Japon-Afrique : des milliards d’investissements sont proposés, mais l’attention est portée sur la manière dont l’Afrique définit ses priorités, encadre les partenariats et stimule l’intégration régionale. La conférence a mis en lumière que la réussite de ces engagements dépendra de leur alignement avec les stratégies locales et de la capacité des deux parties à collaborer sur le long terme dans un cadre de respect mutuel et de réciprocité.

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