Sommet Emerging Valley : un co-développement « gagnant-gagnant »
Emerging Valley est de retour à Marseille, capitale de ce carrefour euro-africain de l’innovation, pour sa septième édition, qui se tient le 28 novembre. Bilan et perspectives de l'entrepreneuriat entre les deux rives, avec Samir Abdelkrim, co-fondateur du forum.

Propos recueillis par Mérième Alaoui
A la veille de Emerging Valley et fort de votre expertise, quelles sont les évolutions de l’écosystème tech africain ?
L’écosystème tech africain se distingue de plus en plus par une dynamique particulièrement inspirante, marquée par la montée en puissance de l’entrepreneuriat féminin et des jeunes. Les femmes africaines jouent un rôle de premier plan dans cette révolution tech, brisant les barrières et apportant des innovations significatives dans des domaines variés comme la fintech, la santé numérique, et l’éducation. Leur contribution ne se limite pas à la création d’entreprises technologiques ; elles sont également des leaders dans la formation et le mentorat de la prochaine génération d’entrepreneurs. Emerging Valley 2023 sera une vitrine pour ces talents, avec des sessions spéciales dédiées à la mise en lumière des succès de ces entrepreneurs et à la discussion sur la manière dont ils façonnent l’avenir de l’Afrique. Une de ces discussions, sous forme de bootcamp, a été élaborée en partenariat avec Social & Inclusive Business Camp (SIBC), de l’AFD. Ces interactions offriront des perspectives précieuses sur la manière dont l’entrepreneuriat féminin et la jeunesse africaine transforment l’écosystème tech et tracent la voie vers un avenir plus inclusif et innovant.
Quels défis restent à relever ?
Le manque de financement et de soutien réglementaire demeure un enjeu majeur, d’autant plus à l’heure d’une contraction significative des marchés internationaux. En effet, les levées réalisées au premier trimestre sur marché des venture capital (VC) africain en 2023 a chuté de 52,4%, dépassant péniblement le milliard de dollars, selon Disrupt Africa. La programmation d’Emerging Valley inclut des tables rondes et des ateliers axés sur ces thématiques, visant à trouver des solutions pratiques et à stimuler les investissements dans les startups africaines.
Marseille, carrefour entre l’Europe et l’Afrique, accueille de nouveau le sommet Emerging Valley. Avez-vous des exemples d’initiatives nées de ce rapprochement entre les deux rives de la Méditerranée ?
Des collaborations fructueuses ont été établies entre startups africaines et européennes grâce à des programmes d’accélération conjoint en collaboration avec des structures locales, comme l’Accélérateur M ou Marseille Innovation, et à des partenariats en recherche et développement. Le sommet partagera des études de cas sur ces succès. Le dispositif Provence Africa Connect porté par la métropole Aix-Marseille-Provence dans le cadre d’Emerging Valley illustre parfaitement cette dynamique. D’ailleurs, une session « Innover en Provence avec la Métropole Aix-Marseille-Provence, Capitale Européenne de l’Innovation », aura lieu le 28 novembre pour présenter le nouveau dispositif d’accompagnement des startups africaines en Provence dans le cadre d’Emerging Valley !
Justement, quelles seront les principales nouveautés de cette septième édition, les têtes d’affiches ?
Cette édition présentera des panels sur les nouvelles technologies comme la blockchain et l’intelligence artificielle (IA), et verra la participation de figures de proue de l’innovation mondiale, venues d’Europe et d’Afrique, comme Hafsat Abiola, militante des droits humains et présidente de Women in Africa (WIA), Victor Otieno Agolla, directeur du département Économie numérique et startups au sein de la ville de Nairobi, Jean-David Malo, directeur de Conseil européen de l’innovation, Claude Borna, présidente de l’agence de développement Sèmè City ou encore Maeva Kpadonou, co-directrice de Innovation for Policy Foundation (I4Policy). Nous aurons bien entendu des pépites disruptives dans leurs secteurs telles que Bamba Lo, fondateur de PAPS, une application en ligne de livraison à domicile et Mathias Léopoldie, fondateur de Julaya, une banque digitale, sans oublier des leaders du VC à impact dirigé vers l’Afrique tels que Adly Thoma, président de Gemini Africa, Takuma Terakubo, à la tête de Uncovered Fund Inc. et Thomas Bigagli, partner de Plug and Play. Des sessions dédiées permettront des interactions directes avec ces leaders.
Le Kenya, pays anglophone, sera mis à l’honneur, à travers la présence d’athlètes de haut niveau. Quelles sont les relations économiques entre la France et le Kenya ?
Le partenariat entre le Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône et le Kenya a marqué une étape importante dans notre vision du co-développement franco-africain. L’accueil des athlètes kenyans dans la perspective des Jeux olympiques (JO) 2024 est un bon exemple de coopération sportive, mais aussi un symbole de liens plus profonds tissés entre nos régions. Cette initiative met en lumière la manière dont le sport peut servir de catalyseur pour des échanges culturels et économiques plus larges. Des intervenants des deux pays discuteront des progrès réalisés et des opportunités futures. Ne manquez surtout pas notre session consacrée aux JO, avec la mise en valeur de quatre athlètes médaillés dont David Rudisha, l’actuel recordman du 800 mètres, le président du Comité olympique kenyan, Paul Tergat et le double champion olympique du marathon, Eliud Kipchoge.
Par ailleurs, la collaboration d’Emerging Valley avec la French Tech Nairobi est un autre pilier de cette vision. Elle permet de faire venir des startups kenyanes innovantes à Marseille, créant un pont direct entre les écosystèmes technologiques. Cela témoigne de notre engagement à soutenir et valoriser les talents africains, en leur offrant une plateforme pour se connecter, partager leurs idées et explorer de nouvelles opportunités de croissance avec la participation de scale-up (entreprises entre la startup et la licorne, ndlr) à succès made in Nairobi à l’image de Asilimia, entreprise de fintech fondée par Morgane Kablan.
Vous défendez un co-développement gagnant-gagnant entre la France et l’Afrique. Quel rôle jouent les diasporas africaines installées en France ?
Les diasporas africaines en France jouent un rôle essentiel dans le co-développement. Des panels sont prévus pour discuter des avancées concrètes, avec les représentants du programme MEET Africa (Mobilisation Européenne pour l’Entrepreneuriat en Afrique) et du programme dédié aux diasporas de l’école de commerce Kedge, des entrepreneurs issus des deux rives et des investisseurs spécialisés tels que Ciwara Capital. Durant Emerging Valley, vous retrouverez leurs perspectives, avec des données et des témoignages.
L’Afrique abrite la grande majorité des francophones. Comment la langue, et donc la culture, peut-elle améliorer le rapprochement des écosystèmes ?
La Francophonie, au-delà de sa richesse culturelle, devient un terrain fertile pour l’innovation technologique. Cette vision a été développée par l’Elysée. Pour preuve, avec l’émergence d’un pôle d’expertise francophone en IA, représenté à Emerging Valley, nous assistons à un formidable élan vers l’accélération des solutions en IA dans les pays francophones d’Afrique. Des agences comme Expertise France et l’Agence Universitaire de la Francophonie jouent un rôle crucial dans ce développement, en menant des travaux spécifiques pour accélérer l’adoption de ces technologies innovantes. De plus, notre partenariat avec le réseau des Instituts français constitue un atout majeur. Ils mettent en avant de nombreux innovateurs francophones repérés dans le cadre des forums “Notre Futur” qu’ils organisent. Cette collaboration illustre parfaitement comment la langue et la culture francophones peuvent non seulement renforcer les liens mais aussi stimuler l’esprit d’innovation et de créativité technologique dans les écosystèmes.