RDC : Après la présidentielle, la reprise économique ?
La République démocratique du Congo (RDC) vient d’élire son nouveau président Felix Tshisekedi, tournant, du moins en apparence, la page des années Kabila. Mais le nouveau dirigeant fraichement élu doit faire face à d’énormes défis économiques pour redresser la situation du pays.
Par Assanatou Baldé
Après l’euphorie de la victoire, même si elle aura été entachée par de vives contestations, reste à se mettre au travail pour redresser un immense pays de 80 millions d’habitants. Avec l’élection de Felix Tshisekedi, la République démocratique du Congo a pour le moment tourné une page de son histoire, en obtenant le départ de Joseph Kabila, et en évitant un bain de sang. Le pays a un nouveau président mais ce dernier pourra-t-il renouveler l’économie pour améliorer les conditions de vie de ses concitoyens ?
On ne le dira jamais assez la RDC regorge d’immenses richesses minières (cuivre, cobalt, or, diamants) mais reste paradoxalement le 7ème pays en matière de développement le plus pauvre de la planète. Il faut dire qu’en dépit de l’exploitation minière par des multinationales, son économie est peu développée et bien trop dépendante de l’évolution du cycle des matières premières. Plus de 90% de ses exportations sont des matières premières, dont 40% sont à la direction de la Chine.
Une économie trop dépendante des matières premières
C’est ainsi qu’en 2015, la chute des matières premières a provoqué un net recul de la croissance. Leur remontée a permis au produit intérieur brut de progresser de 2,4% en 2016 et de 3,7% en 2017. Il pourrait même atteindre 3,8% en 2019, d’après la Banque mondiale. Des chiffres améliorés grâce au cours du Cobalt (dont le pays est le premier producteur mondial) qui a augmenté de 127%, celui du coltan de 59% et du cuivre de 13%.
Le pays fait face également à une autre difficulté, c’est son climat des affaires, régulièrement déploré par les entreprises. Même si à l’état actuel il est possible de créer une entreprise en trois jours, selon le cabinet Deloitte, « une société établie dans l’ensemble de la RDC subit chaque année en moyenne 250 contrôles de tous types ».
« La RDC reste un environnement très difficile pour faire des affaire »
Même son de cloche dans le rapport du département d’Etat américain, datant de juillet 2018, consacré au climat de l’investissement dans le monde, dont l’objectif est de fournir des informations aux entreprises américaines sur le climat des affaires de ces pays. « La RDC reste un environnement très difficile pour faire des affaire », note le rapport. Malgré de nombreuses réformes pour attirer les investisseurs « le climat des affaires s’est détériorée en 2017 », précise-t-il, soulignant que « beaucoup d’investisseurs se plaignent d’une pression fiscale élevée et d’un système de taxation trop complexe, redondant et opaque. » Toujours selon ce rapport, « certaines agences gouvernementales exercent des pressions administratives importantes sur les entreprises avec des audits et inspections qui conduisent souvent à l’imposition d’amendes sur des bases discutables ».
Une mauvaise gouvernance aux lourdes conséquences
Le chantier auquel fait face le nouveau chef d’Etat est gigantesque. Car il ne s’agira pas de restaurer le climat économique du pays afin que les investisseurs s’y sentent mieux mais également de trouver les moyens pour que les populations puissent bénéficier des retombées de l’économie et d’améliorer leurs conditions de vie. Pour l’économiste congolais et ancien entrepreneur Alkitengue, qui s’exprimait sur Twitter, au lendemain de l’élection présidentielle « les vraies élections seront celles des municipales. En fait, elles sont les plus importantes pour les citoyens et elles donneront le pouvoir et des responsabilités au plus près des consommateurs de services publics. Il faut s’y préparer et les jeunes devraient saisir la chance. »
L’expert estime également que dans le redressement de cette économie, il ne faut pas omettre d’y inclure l’arrière pays bien trop souvent mis à mal dans les politiques économiques africaines. « On a toujours vécu comme si nos villages étaient sur une autre planète et pourtant 70% de congolais y vivent », affirme-t-il. « Les pays africains, la RDC en tête, devront se doter de plans spéciaux pour une ruralité moderne, dynamique financièrement rentable afin d’engager la migration interne inversée. Nous devrons aligner des politiques publiques et des financements d’intégration Economique ».