Pourquoi l’Inde devrait diriger l’intégration de l’Afrique dans l’économie mondiale
L'approche du pays en matière de soft power est non intrusive et basée sur le partenariat, ce qui correspond bien aux aspirations des nations africaines.
Par Sumit Sarawgi, Patrick Dupoux*
La visite d’État du Premier ministre Narendra Modi aux États-Unis en juin a fait la une des journaux à plusieurs titres. L’un d’entre eux a été l’approbation par le président américain Joe Biden de l’idée de faire de l’Union africaine (UA) un membre permanent du G20 – pour former le G21. Cette initiative d’intégration africaine représente un élément central de l’héritage indien du G20 de 2023 et illustre son engagement envers le thème « Vasudhaiva Kutumbakam » (le monde est une seule famille). Ayant été largement acceptée par plusieurs dirigeants du G20, l’initiative a ouvert la voie à un débat sur ce que cela signifie exactement pour l’Afrique et le reste du monde, et sur la manière dont l’Inde est le partenaire idéal pour aider à construire des ponts pour l’intégration mondiale.
Le sujet du parcours d’intégration de l’Afrique est un sujet bidimensionnel lié à l’intégration diplomatique et économique. L’intégration diplomatique implique de donner à l’UA une plus grande voix sur la scène mondiale. L’architecture de la gouvernance mondiale repose sur la représentation à travers la simple taille économique, dirigée depuis longtemps par les pays développés, ou le « Nord global ». Représentant environ 85 % de la population mondiale, le « Sud global » s’efforce de présenter un front uni, en poussant à des réformes de la gouvernance et à une représentation plus large des intérêts des économies en développement.
Plus de 50 % de l’augmentation prévue de la population mondiale jusqu’en 2050 proviendra uniquement des pays d’Afrique subsaharienne, soulignant le rôle central que joueront la jeunesse, la main-d’œuvre et l’économie de l’Afrique dans les temps à venir
L’intégration économique du continent est essentielle pour le monde à bien des égards. Plus de 50 % de l’augmentation prévue de la population mondiale jusqu’en 2050 (8 à 9,7 milliards) proviendra uniquement des pays d’Afrique subsaharienne, soulignant le rôle central que joueront la jeunesse, la main-d’œuvre et l’économie de l’Afrique dans les temps à venir.
Il ne reste que sept ans pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies. Cela place le sujet de l’intégration africaine au premier plan, étant donné que le continent abrite 33 des 46 pays les moins avancés du monde. Alors que les progrès dans la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) se poursuivent, l’Afrique reste fragmentée géographiquement, logistiquement et économiquement. L’intégration de l’UA au G20 constitue une première étape idéale vers le renforcement de l’intégration diplomatique et économique, et un pas de géant vers la réinstallation de la confiance multilatérale.
L’UA peut faire entendre sa voix non seulement sur des questions d’importance géopolitique, mais aussi sur des sujets hautement prioritaires allant du financement climatique et d’une transition énergétique juste à la nécessité de réformes dans les institutions de Bretton Woods, entre autres, qui affectent directement la vie du continent. intérêts.
Le parcours réussi de l’Inde dans la promotion du développement socio-économique de ses citoyens, notamment en exploitant la puissance des technologies numériques, présente un modèle précieux qui pourrait être exploité pour autonomiser les nations africaines, en favorisant une croissance inclusive et un progrès durable à travers le continent. L’approche de l’Inde en matière de soft power est non intrusive et basée sur le partenariat, ce qui correspond bien aux aspirations des nations africaines. Ces facteurs font de l’Inde le partenaire idéal dans le processus d’intégration plus vaste de l’Afrique.
La création d’un Conseil d’action dédié à l’intégration économique africaine dans le cadre du groupe d’engagement Business20 (B20) d’ici la présidence indienne de 2023 a été une autre initiative remarquable. Tout en encourageant la communauté mondiale des affaires à répondre aux besoins et au potentiel de l’intégration de l’Afrique, cela ouvre la voie au renforcement de la voix des entreprises africaines sur la scène mondiale. Complété par des initiatives récentes telles que l’African Business Leaders Coalition (ABLC), qui est le premier partenariat panafricain de PDG, cela permettrait aux intérêts africains de jouer un rôle directeur dans le discours à travers les forums, autour des priorités d’aujourd’hui.
Les États membres de l’UA devront accorder la flexibilité et l’agilité nécessaires au Secrétariat de l’UA pour présenter un front uni sur des questions mondiales urgentes
Cela étant dit, il faut reconnaître que le parcours d’intégration comportera son lot de défis. Les États membres de l’UA devront accorder la flexibilité et l’agilité nécessaires au Secrétariat de l’UA pour présenter un front uni sur des questions mondiales urgentes, malgré la prévalence d’opinions divergentes. L’UA devra également trouver le juste équilibre entre les priorités continentales (dans le cadre de l’Agenda 2063) et les priorités mondiales qui ne sont pas toujours parfaitement alignées. Il devra également renforcer stratégiquement ses relations diplomatiques avec les différents pays du G20, afin de recevoir un soutien et une approbation sur les priorités critiques.
Toutefois, les avantages de l’intégration africaine dépassent de loin les défis potentiels. Exploiter son potentiel n’est pas seulement une opportunité pour l’Afrique, mais un impératif collectif mondial pour nourrir un continent qui détient la clé d’un avenir meilleur pour nous tous. Grâce à des forums comme le G20 et le B20, le monde peut montrer son engagement à permettre la transformation du continent en construisant et en renforçant les ponts d’intégration.
Sumit Sarawgi est directeur général et associé principal du BCG, et Patrick Dupoux est directeur général, associé principal et responsable de l’Afrique du BCG.
Source : LiveMint