Pathé Dione Des mathématiques aux assurances
Fils d’officier militaire, le fondateur du groupe d’assurance Sunu, décédé le 12 janvier 2023 à Paris, en France, des suites de maladie, avait d’abord choisi d’enseigner les mathématiques. Par la suite, il s’est révélé un manager exceptionnel dans les assurances.
Par Bernard Bangda
Le monde de l’assurance en Afrique est groggy. Il vient de perdre l’un de ses mastodontes. Pathé Dione, le fondateur de Sunu, le premier groupe d’assurance vie d’Afrique de l’Ouest, est décédé à Paris, en France, le 12 janvier 2023 des suites de maladies.
« Très organisé et méthodique »
C’est à Dakar, au Sénégal, que naît ce fils de militaire de l’armée française (avant l’indépendance du Sénégal, ndlr). Ce qui lui a toujours, et certainement, valu d’être qualifié « de dirigeant austère ». Mais aussi « très organisé et méthodique ». « Ces traits de caractère de sa formation initiale et rigoureuse en mathématiques », explique un de ses proches. Après des études primaires et secondaires au pays, Pathé Dione, qui ne se séparait jamais de sa pipe, s’envole pour la France pour poursuivre sa formation supérieure. Qui, dès 1966, le conduit à l’enseignement des mathématiques. Jusqu’en 1972 lorsqu’il rejoint la société d’assurance les Mutuelles du Mans. Au retour d’un séjour professionnel de cinq ans au Tchad, il décide de reprendre des études d’économie à l’université Panthéon-Sorbonne. Pathé Dione y obtient une maîtrise et un DEA. En 1980, il décroche un doctorat en économie à l’université de la Sorbonne.
Après un passage à l’École nationale d’assurances puis au Centre des hautes études d’assurances de Paris, le creuset des cadres de direction, en 1979, il décroche un emploi dans le groupe américain, Cigna Corporation. Il est alors affecté en 1980 en Côte d’Ivoire avec pour mission d’y créer une filiale, Colina. Celle-ci est aujourd’hui, le principal concurrent de Sunu sur son marché africain. En 1984, il est promu au poste de directeur Afrique de l’Union des Assurances de Paris (UAP) jusqu’à son absorption par AXA en 1997.
Claude Bébéar, le mentor
Las de travailler pour d’autres, et en quête de nouvelles motivations, Pathé Dione décide, en 1998, de créer Sunu (« notre » en wolof). Il est accompagné dans ce projet panafricain par d’anciens collaborateurs qui croient en lui et à son expérience dans le domaine de l’assurance.
Un fait marque ce tournant : sa rencontre avec Claude Bébéar. Pathé Dione avait coutume de présenter « cet homme extraordinaire sur lequel je suis tombé » comme « celui qui a manifesté une certaine reconnaissance pour le travail [que j’avais] effectué ». C’est d’ailleurs Claude Bébéar qui l’encourage à créer Sunu après avoir constaté que « l’Afrique ne fait pas partie des priorités d’Axa, qui a surtout des visées sur l’Asie ». L’idée était de « créer une nouvelle société qui reprendrait les filiales africaines de l’ex-UAP ». Claude Bébéar apporte son assistance technique à Sunu dès sa naissance en 1998.
“ En une dizaine d’années, il a fait de Sunu le premier groupe d’assurance vie d’Afrique francophone”
Le succès ne se fait pas attendre. Surtout sur le plan financier. Les banques acceptent de prêter de l’argent à la nouvelle société. Quelques proches attribuent ce succès auprès des banques par « la qualité des relations que Pathé Dione entretient avec le système bancaire, aussi bien en Europe qu’en Afrique, où il travaille en étroite collaboration avec des établissements tels qu’Ecobank et la Bank of Africa (BOA) ». Au plan professionnel, il sera nommé administrateur dans la filiale ivoirienne de BNP Paribas.
Au moment où il décède, Pathé Dione laisse un groupe Sunu présent dans plus de 17 pays en Afrique subsaharienne, désormais leader de l’assurance-vie dans la zone Cima (Conférence interafricaine des marchés d’assurances), avec près de 30 filiales et affiliés. En 2020, ce groupe représentait un chiffre d’affaires de plus de 310 millions d’euros. En une dizaine d’années, il a fait de Sunu le premier groupe d’assurance vie d’Afrique francophone.