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Libérer le potentiel des envois de fonds : une clé pour le développement économique de l’Afrique

Les envois de fonds sont désormais une source financière cruciale pour l’Afrique, dépassant même l'Aide publique au développement (APD) et les Investissements directs étrangers (IDE). Le Working Paper 386 de la Banque africaine de développement examine comment ces flux financiers peuvent être mieux orientés vers des investissements productifs pour soutenir la croissance et le développement du continent.

Les envois de fonds sont devenus l’une des sources de financement les plus importantes pour l’Afrique, dépassant désormais l’Aide publique au développement (APD) et les Investissements directs étrangers (IDE). Selon la Banque africaine de développement, ces transferts ont atteint des niveaux record en 2023, représentant environ 84 milliards de dollars, bien au-delà des flux d’IDE, qui se sont élevés à environ 50 milliards de dollars, et de l’APD, qui a atteint environ 46 milliards de dollars. Ces fonds représentent un soutien économique essentiel pour de nombreuses familles africaines, mais ils détiennent également un potentiel significatif pour financer la croissance économique et le développement durable du continent.

Le Working Paper 386 de la Banque africaine de développement, intitulé « Unlocking Africa’s Potential: Making Remittances Work for Development », se penche sur l’utilisation de ces envois de fonds et sur les moyens de les orienter vers des usages plus productifs. Le rapport suggère que bien que les envois de fonds aient un impact direct sur la consommation des ménages, leur potentiel d’investissement reste largement sous-exploité, limitant ainsi leur capacité à stimuler une croissance économique à long terme.

Les envois de fonds : Une opportunité mal exploitée ?

L’un des enseignements clés du rapport est que bien que les envois de fonds aient un impact immédiat sur la consommation des ménages en Afrique, leur potentiel en matière d’investissements reste relativement faible. Selon le rapport, « l’usage des envois de fonds en Afrique est trop souvent dirigé vers la consommation immédiate, plutôt que vers des investissements dans les secteurs productifs ». Cette tendance, observée dans de nombreuses études précédentes, limite leur contribution à une croissance économique durable.

Cependant, il existe des exceptions notables où certains pays ont su mieux utiliser ces fonds pour financer des investissements productifs. Des pays comme l’Égypte, le Sénégal et le Nigéria ont montré une plus grande propension à investir une partie de leurs remises dans des secteurs stratégiques. « Un petit sous-ensemble de pays présente des réponses d’investissement plus fortes aux envois de fonds, ce qui suggère qu’il est possible de rediriger ces flux vers des secteurs à plus forte valeur ajoutée », indique le rapport.

Les déterminants d’une meilleure utilisation des remises

Pour comprendre pourquoi certains pays parviennent à mieux utiliser les envois de fonds, les auteurs du rapport ont utilisé la méthode de décomposition Oaxaca-Blinder, qui permet d’analyser les différences d’utilisation des fonds entre les pays. Plusieurs facteurs ont été identifiés comme déterminants dans l’orientation des remises vers des investissements productifs.

A commencer par le niveau d’inclusion financière. Les pays avec des systèmes bancaires solides et accessibles ont montré une capacité plus forte à canaliser les fonds vers des investissements à long terme. « Le renforcement de l’inclusion financière est essentiel pour permettre aux familles de gérer leurs remises de manière stratégique et d’investir dans des projets générateurs de revenus », affirment les chercheurs.

Ensuite, la stabilité macroéconomique. Les pays présentant une plus grande stabilité économique et politique ont davantage réussi à rediriger les envois de fonds vers des investissements productifs. La régulation du marché, la maîtrise de l’inflation et des politiques fiscales soutenant l’investissement jouent un rôle crucial dans ce processus.

Enfin, le climat d’investissement. Les pays offrant un climat d’investissement favorable, avec des incitations pour les investisseurs étrangers et locaux, parviennent à mieux utiliser ces fonds. « Un environnement d’affaires stable, avec des politiques de soutien à l’entrepreneuriat, est essentiel pour transformer les envois de fonds en leviers de développement », souligne le rapport.

Des politiques pour débloquer le potentiel des envois de fonds

Le rapport propose plusieurs recommandations pour maximiser l’impact des remises sur le développement économique de l’Afrique. Parmi celles-ci, la promotion de l’inclusion financière se distingue, avec la mise en place de programmes d’éducation financière pour les citoyens, la création de bons de diaspora pour encourager les investissements dans les pays d’origine, et le renforcement des infrastructures financières.

En outre, le développement de projets communautaires et la collaboration entre la diaspora et les gouvernements locaux sont jugés essentiels. « L’engagement de la diaspora est crucial pour créer des partenariats avec les communautés locales et investir dans des projets de développement à long terme », précise le rapport. Les programmes de financement participatif, ainsi que l’encouragement de l’entrepreneuriat, figurent également parmi les leviers efficaces pour transformer ces flux financiers.

Enfin, les institutions financières internationales et les banques de développement multilatérales, telles que la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, jouent un rôle clé dans ce processus. Elles peuvent soutenir les pays africains en fournissant une assistance financière et des capacités techniques pour améliorer la gestion des envois de fonds et les canaliser vers des investissements à fort impact. « Les banques de développement, y compris la Banque africaine de développement et la Banque mondiale, doivent soutenir les initiatives visant à renforcer la gestion des envois de fonds et à les diriger vers des investissements structurants », conclut le rapport.

Vers une transformation des envois de fonds en leviers de développement

En conclusion, le Working Paper 386 de la Banque africaine de développement met en évidence le potentiel considérable des envois de fonds pour devenir un moteur de développement économique en Afrique. Toutefois, pour exploiter pleinement ce potentiel, il est nécessaire de mettre en place des politiques publiques ambitieuses qui favorisent une gestion productive de ces flux financiers. Le rapport insiste sur le fait que les envois de fonds peuvent jouer un rôle clé dans la croissance durable du continent, à condition que des actions stratégiques soient entreprises pour les rediriger vers l’investissement plutôt que la simple consommation. Avec des politiques solides et une mise en œuvre efficace, les envois de fonds peuvent devenir un pilier essentiel du développement de l’Afrique.

Consulter le rapport :  Working Paper 386

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