Jeimila Donty : pionnière de l’entrepreneuriat écologique
Jeimila Donty, fondatrice de Koraï, mène une initiative pionnière en matière d'éco-entrepreneuriat. Originaire de Madagascar et éduquée en France, son parcours témoigne d'un engagement profond en faveur de l'amélioration socio-économique en Afrique. À travers Koraï, elle vise à combler le fossé entre la conservation environnementale et la responsabilité d'entreprise, offrant des solutions innovantes pour inciter les entreprises à participer à la préservation de la biodiversité.
Le 2 février dernier, Jeimila Donty s’est jointe à d’autres entrepreneurs lillois de la diaspora africaine pour participer à la 2ème édition des Conversations Citoyennes. Cet événement, fruit d’une collaboration entre l’incubateur de politiques publiques « Je m’engage pour l’Afrique », fondé par Ileana Santos & Amina Zakhnouf, et la Fondation de l’Innovation pour la Démocratie, dirigée par le Professeur Achille Mbembe, avec le soutien de l’Agence Française de Développement et du Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, avait pour but de réunir entrepreneurs, responsables publics, institutionnels et citoyens afin de réfléchir ensemble au « rôle de l’entreprise dans l’espace citoyen et social en Afrique ». Une thématique qui résonne profondément avec l’engagement de Jeimila.
En tant qu’entrepreneurs à impact, nous aspirons tous à jouer un rôle significatif dans l’instauration d’un modèle démocratique et social
« J’ai rencontré Ileana Santos dans le cadre de JMA il y a bientôt un an. J’ai immédiatement été séduite par cette institution et j’ai souhaité m’impliquer davantage. Nous avons eu l’opportunité de collaborer sur plusieurs projets, notamment autour de la décennie de l’océan. Ensemble, nous avons conçu un kit de sensibilisation destiné aux jeunes, les encourageant à s’engager en faveur de la préservation des océans. Étant donné que Lille abrite un pôle d’entrepreneurs de la diaspora, j’ai trouvé pertinent qu’ils organisent un événement dans cette ville. Après une première édition à Poitiers, la 2ème édition des Conversations Citoyennes s’est tenue à Lille. J’ai eu le privilège de contribuer à la définition de la thématique, axée sur le « business act for democracy ». En tant qu’entrepreneurs à impact, nous aspirons tous à jouer un rôle significatif dans l’instauration d’un modèle démocratique et social. »
Je pouvais jouer un rôle important dans l’amélioration des conditions de vie socio-économiques de mes concitoyens
Cette idée a germé très tôt dans l’esprit de Jeimila. « Née et élevée à Madagascar, j’ai émigré en France à l’âge de 17 ans pour poursuivre mes études puis ma carrière professionnelle. Issue d’une famille d’entrepreneurs, j’ai toujours su que je me lancerais dans l’entrepreneuriat. Les disparités économiques entre la France et Madagascar, ainsi qu’entre l’Europe et l’Afrique en général, m’ont amenée à réaliser que je pouvais jouer un rôle important dans l’amélioration des conditions de vie socio-économiques de mes concitoyens. C’est pourquoi j’ai orienté mes études à l’ESSEC vers l’Afrique, avec des stages effectués en Afrique du Sud et au Togo, ainsi qu’un cursus Centrale-ESSEC au Maroc et en Côte d’Ivoire. »
En créant Koraï, j’ai cherché à concilier ma volonté de contribuer à la restauration de la planète avec les besoins des entreprises internationales en matière de responsabilité sociale et environnementale
Un événement tragique a finalement été le catalyseur qui a poussé Jeimila à se lancer pleinement dans l’entrepreneuriat. Lorsque son père décède brutalement pendant la pandémie de Covid-19, Jeimila, bloquée en France, ne peut retourner à Madagascar pour lui dire adieu. « Cette période a été extrêmement difficile et a entraîné une profonde remise en question. Suis-je à ma place ? La vie est courte, suis-je en train de faire ce que je suis censée faire ? J’ai décidé de recentrer mes efforts sur mon projet initial : contribuer à l’amélioration des conditions de vie socio-économiques de mes concitoyens. C’est ainsi qu’est née l’idée de Koraï. Avec le soutien de mes trois frères, nous avons repris l’exploitation familiale spécialisée dans la reproduction de coraux destinés à l’exportation. Je souhaitais que cette entreprise me ressemble. En créant Koraï, j’ai cherché à concilier ma volonté de contribuer à la restauration de la planète avec les besoins des entreprises internationales en matière de responsabilité sociale et environnementale. »
Depuis un an et demi, la jeune entreprise accompagne les entreprises françaises dans leur transition écologique, en les aidant à passer de l’idée à l’action. « Aujourd’hui, la question de la réduction voire de la compensation des émissions de carbone est devenue une préoccupation majeure. Les entreprises sont conscientes de cet enjeu, mais celui de la biodiversité reste souvent négligé. Nous les aidons à répondre à leurs nouvelles obligations en matière de diversité et de carbone en replantant des coraux et des mangroves en Afrique. Le corail, qui représente seulement 1% de la surface des océans, abrite pourtant 25% de la biodiversité marine. Les mangroves, quant à elles, ont un impact écologique bien plus important que les forêts tropicales. »
Cette initiative est une première en France. « Nous sommes les pionniers dans ce domaine. Aujourd’hui, ce sont principalement des associations qui mènent ce type de projets. Notre approche, très innovante, est au cœur de l’ADN de Koraï : nous utilisons les mécanismes légaux et financiers existants pour contraindre les entreprises à agir et leur proposons des solutions concrètes. »
C’est le début d’une aventure passionnante : nous avons devant nous 500 mètres carrés de récif corallien à restaurer
La jeune entreprise dispose de sa première aire maritime dans le nord de Madagascar, où elle développe actuellement son projet pilote. « Nous prévoyons de signer les premiers contrats en 2024. C’est le début d’une aventure passionnante : nous avons devant nous 500 mètres carrés de récif corallien à restaurer. »