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Etude :“S’adapter ou mourir”, le défi des pays africains pour financer le changement climatique

A défaut d’être responsables du réchauffement du climat, les Etats africains doivent adapter leurs économies et leurs budgets. Ils investissent, chaque année, en moyenne, 2,8 % de leur produit intérieur brut (PIB), selon le rapport de Power Shift Africa. Un taux loin d’être suffisant. 

Par Ulrich Viany, à Cotonou

Continent le plus vulnérable aux changements climatiques, l’Afrique dispose de peu de ressources pour y faire face. Les gouvernements, cependant, investissent de plus en plus dans leurs plans d’adaptation, selon le think-tank, Power Shift Africa, qui a publié un rapport intitulé « S’adapter ou mourir : une analyse des stratégies africaines d’adaptation au climat », en février 2022.

« En moyenne, les pays observés cherchent à investir chaque année 4,04 % de leur PIB actuel » relève le rapport qui a examiné les plans nationaux d’adaptation de sept pays, soumis, depuis 2018, à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Il s’agit de l’Éthiopie, du Kenya, du Libéria, de la Sierra Leone, de l’Afrique du Sud, du Soudan du Sud et du Togo.

Le document note que, pour ces pays en développement, les coûts annuels d’adaptation pourraient atteindre au total 300 milliards de dollars d’ici à 2030. Les chiffres varient entre 90 millions de dollars par an pour la Sierra Leone et six milliards de dollars pour l’Éthiopie.

Les effets du changement climatique sont divers et inquiétants. En Ethiopie, par exemple, il pourrait se traduire par des inondations, des sécheresses record et des déplacements de populations. Au Sud-Soudan, la majeure partie du territoire pourrait s’assécher d’ici la fin de ce siècle ; et les zones côtières, très peuplées, du Libéria, s’inonder.

Le ratio entre moyens disponibles et moyens nécessaires élevé

Pour faire face aux catastrophes, le plan national d’adaptation éthiopien prévoit de mettre en œuvre une série d’actions, à l’horizon 2030, dont le coût est évalué à 90 milliards de dollars, soit six milliards de dollars par an. Ce qui équivaut à environ 5,6 % du PIB actuel. 

Les dépenses d’adaptation des pays africains sont loin de couvrir leurs besoins. D’après le document de Power Shift Africa, qui cite un autre rapport, publié en 2017, l’écart entre les montants disponibles et les fonds nécessaires, pour une adaptation significative, atteint 80 %, en Afrique. Ainsi, où il faudrait investir cent dollars, le continent africain ne peut qu’en fournir vingt. Malheureusement, « des chiffres plus récents suggèrent que cet écart est en train de se creuser » souligne le rapport. Face à une telle situation, une augmentation drastique du financement paraît inévitable. Mais, les pays africains ne peuvent pas faire face, seuls, à ces dépenses. « Aucun des pays pris en compte dans cette analyse ne dispose des ressources suffisantes, ne serait-ce pour les priorités d’adaptation les plus urgentes. La plupart dépend de l’aide internationale. Dans le cas du Togo, cette aide représente 80% des investissements publics » indique Power Shift Africa.

Vers un financement accru

Aux pays riches, majoritairement pollueurs, et dont les activités constituent la principale cause du réchauffement climatique, le rapport de Power Shift Africa recommande d’assumer leurs responsabilités et d’aider les communautés et pays les plus pauvres à s’adapter, comme ils s’y sont engagés lors des dernières Conférences sur le climat (COP). « Le monde riche doit cesser de mettre de côté les besoins des personnes vulnérables s’il veut adopter une approche équitable pour l’urgence climatique » estime le rapport. Il est impensable que l’adaptation échoue à cause d’un manque de financement, ajoute-t-il, en résumé.

Cible des recommandations : la COP 27 qui se tiendra du 6 au 18 novembre prochain à Charm-el-Cheikh, en Égypte. Le rapport affirme que la présidence égyptienne de la COP, les gouvernements africains, et les pays du Sud global, en général, doivent commencer de toute urgence à définir la COP 27 comme la « COP de l’adaptation ». Afin de corriger le déséquilibre historique du processus de la CCNUCC.

« Charm-el-Cheikh doit donner un aperçu détaillé des éléments pour atteindre l’objectif mondial sur l’adaptation… Des fonds doivent être massivement injectés, dans les économies les plus vulnérables, pour les aider à faire face aux impacts croissants du changement climatique » plaide le document. En conclusion, la COP 27 doit aboutir à un appel clair aux pays riches pour augmenter leur financement annuel, pour les prochaines années, et accélérer la mise en œuvre des plans nationaux pour l’adaptation au changement climatique.

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