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eLearning Africa : le futur de l’éducation repensé à Kigali 

Kigali accueillait du 11 au 13 mai eLearning Africa. Décideurs publics, membres du corps enseignant, fournisseurs de contenus pédagogiques numériques et autres se sont ainsi réunis pour envisager un nouveau modèle éducatif à l’aune de la quatrième révolution industrielle. 

Par Dounia Ben Mohamed à Kigali,

Images et montage Hervé Mbaraga

Avec plus d’un millier de délégués, 68 sessions parallèles, 50 stands d’exposition et des représentants de 18 secteurs, la 15ème conférence d’eLearning Africa, qui se tenait du 11 au 13 mai à Kigali, réunissant les principaux acteurs de l’écosystème éducatif panafricain, a ouvert une multitude de débats thématiques et présenté des technologies de pointe dans le domaine de l’apprentissage en Afrique. 

« Manque d’infrastructures, formation des enseignants, adaptation des contenus pédagogiques aux nouveaux besoins de l’économie… Autant de défis auxquels les nouvelles technologies apportent des solutions« 

Interview Abdoulaye Mbengue, fondateur de TooShare 

Avec un consensus : le futur de l’Afrique dépend de l’éducation. Or avec une population qui doit doubler d’ici 2040, le continent, qui peine déjà à offrir une éducation de qualité pour tous, devra faire face à des défis majeurs : manque d’infrastructures, formation des enseignants, adaptation des contenus pédagogiques aux nouveaux besoins de l’économie… Autant de défis auxquels les nouvelles technologies apportent des solutions. Sachant que 80% des métiers d’aujourd’hui sont amenés à disparaître dans les années à venir, avec l’apparition de l’intelligence artificielle notamment, l’urgence est de saisir les opportunités qu’offrent ces solutions technologiques et de les adapter aux réalités et aux besoins du continent. 

« Ces deux problèmes se posent dans le domaine de l’éducation : l’esclavage épistémique et la servitude économique »

Ce qui nécessite de repenser entièrement les modèles éducatifs en vigueur sur le continent, comme ailleurs du reste. Le philosophe Mogobe Ramose, invité d’eLearning Africa, rappelle qu’il n’y a pas de solution miracle aux défis systémiques de l’éducation en Afrique, et remet en question les fondements mêmes de ces systèmes. « L’histoire de l’éducation en Afrique, du point de vue de l’expérience de la colonisation, a consisté non seulement à sortir des ténèbres, mais aussi à conduire les Africains conquis à l’esclavage épistémique. Et ce n’est pas tout. Les peuples conquis ont également été conduits à l’esclavage économique, qui est encore un très gros problème aujourd’hui. Ces deux problèmes se posent dans le domaine de l’éducation : l’esclavage épistémique et la servitude économique », soutient l’ancien réfugié politique, ayant été exilé d’Afrique du Sud pendant le régime de l’apartheid. 

Interview Rogers Sithole, directeur OneConnect

Et c’est à ce titre que l’elearning offre une opportunité majeure au continent : alors que la majorité des manuels scolaires utilisés dans les écoles sont produits en Occident, les nouvelles plateformes qui se multiplient, qu’elles soient développées en Afrique ou ailleurs, s’adaptent de plus en plus aux besoins du continent. A travers un contenu pédagogique qui répond aux attentes des apprenants africains. 

Un marché boosté par la pandémie

Interview Mike Feerick, CEO Alison 

Le marché de l’EdTech est déjà en forte croissance côté business. Avec un chiffre d’affaires mondial estimé à 254,8 milliards de dollars en 2021, et qui devrait plus que doubler d’ici 2027 (à 605,4 milliards de dollars), selon le cabinet d’études spécialisé Arizton, l’edtech s’affiche désormais comme un marché 8 fois plus important que le secteur des logiciels. L’organisation suisse Seedstars- qui investit dans les jeunes sociétés des pays émergents- estime pour sa part que 9% des applications téléchargées sur l’App Store concernent aujourd’hui des contenus éducatifs. Pas étonnant dans ces conditions que l’Afrique aussi, boostée par les besoins accrus de digitalisation nés de la pandémie du Covid (fermeture d’écoles), voit se multiplier les offres d’apprentissage en ligne.

Une offre qui se multiplie autant qu’elle se diversifie

Interview Shashank Kapoor, Cypher Learning

Cours en ligne sur le patrimoine africain, formations techniques sur les métiers de l’environnement, modules de conception de contenus animés… L’offre se multiplie autant qu’elle se diversifie. Mieux, la filière a le mérite de générer à la fois des emplois et des revenus. D’où l’intérêt des acteurs publics et des bailleurs de fonds pour ce secteur, tout autant que celui des opérateurs de technologie mondiaux présents sur le continent.

Interview Clément Froger, Chef de projet, Chaucot Dubost

Une des principales leçons tirées de la pandémie Covid 19. Alors que la majorité des écoles ont dû fermer leurs portes, l’elearning s’est avéré être une véritable alternative pour peu que celles-ci disposent d’un accès à Internet et aux plateformes éducatives numériques. Aussi, pour les établissements scolaires et universitaires qui n’étaient pas encore équipés, la pandémie leur a rappelé l’urgence, et l’intérêt, d’une rapide mise à jour.  En effet, 50% des enseignants, formateurs et spécialistes africains de technologies éducatives ayant pris part au sondage réalisé par eLearning Africa et EdTech Hub pensent que la pandémie de Covid-19 représente une opportunité « significative » ou « très significative » pour l’éducation en Afrique. Ainsi selon les résultats du sondage publiés par eLearning Africa et EdTech Hub démontrent que de nombreux éducateurs africains sont optimistes quant à l’avenir. Pour eux, la pandémie de Covid-19 a été une « sonnette d’alarme » qui va encourager un recours accru à l’apprentissage mixte et aux nouvelles formes d’enseignement et de formation assistées par les technologies dans les écoles, collèges et universités d’Afrique.

Intitulé « Impact de la pandémie de Covid-19 sur l’éducation en Afrique », le sondage se fonde sur des entretiens avec plus de 1 600 professionnels de l’éducation et des technologies répartis sur le continent, à qui il a été demandé de décrire leurs expériences de la crise de Covid-19 et ses implications. 85% des personnes interrogées pensent que l’utilisation des technologies sera plus répandue en raison de la crise. Ce qui confirme une conviction déjà inscrite à l’agenda de l’Union africaine, à savoir, les technologies sont considérées comme la clé de l’expansion rapide de l’éducation et, donc, de la future croissance économique du continent.

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