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Côte d’Ivoire : une bourse pour le financement de l’industrie pharmaceutique

La 10è édition des Journées des pharmaciens de Côte d’Ivoire portait non sur des aspects médicamenteux mais, la problématique du financement de l’activité pharmaceutique en Côte d’Ivoire avec un dialogue de sourds entre opérateurs économiques et État.

Par Issiaka N’guessan à Abidjan

Les pharmaciens ivoiriens entendent contribuer à la dynamique économique en cours. Le pays subit une transformation structurelle sans exclusive. Autoroute, routes, universités publiques, déploiement de service…la Côte d’Ivoire avance avec malheureusement 19% de contribuables qui payent 80% des recettes fiscales. Parmi ce pourcentage de 19%, figure le secteur pharmaceutique. Les acteurs de ce secteur d’activité ont donc voulu échanger directement avec la direction générale des Impôts pour présenter la pesanteur fiscale qui plombe leurs activités.

Digitalisation et bourse, des prescriptions

Le représentant de la DGI à cette 10ème édition des Journées du Conseil de l’Ordre des pharmaciens de Côte d’Ivoire, M.Bénié a estimé que « la digitalisation est un moyen d’élargissement de l’assiette fiscale. » Toutefois, une offre émanant  d’EDC-ACCES MANAGMENT (filiale du groupe ECOBank), met un accent sur la bourse au profit des pharmaciens et même du public. Avec un produit d’épargne qui fonctionne comme un compte épargne classique, un fonds diversifié qui est un mixte d’actions et d’obligations et le fonds d’actions, les promoteurs expliquent que les pharmaciens, peuvent ouvrir un compte en tant que personne morale, ou donner leur argent, pour faire fructifier leur épargne à hauteur de 5% et plus. Ce rendez-vous autour du financement de l’activité pharmaceutique était une trop belle opportunité pour inciter ces opérateurs économiques du secteur de la santé, à s’approprier ce nouvel outil de financement par la bourse. Les pharmaciens, eux, demandent un traitement particulier.

Une fiscalité particulière

Parmi les panélistes de ce 7 octobre, dernier jour de ce rendez-vous des pharmaciens Ivoiriens qui ont convié leurs homologues du Cameroun, du Togo, du Bénin, du Burkina Faso, du Mali, Ouattara Aboubacar, responsable de la Ficoges, un cabinet de conseil, membre de la confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI). Il estime qu’au regard de la particularité du secteur pharmaceutique, « il faut mettre en place une fiscalité particulière pour éviter le trafic illicite de médicaments, un exercice courant dans l’espace UEMOA avec son impact sur la sécurité. » C’est, a-t-il fait savoir, « 20 fois plus porteur que le trafic de drogue. » Dans le même élan, Eugène Koffi, directeur d’un laboratoire de production de médicaments estime qu’il « est important d’importer le médicament que d’être installé » en Côte d’Ivoire. « On est étonné qu’après 20 ans, on n’ait pas d’industrie pharmaceutique », dénonce-t-il. « Il n’y a que la fiscalité qui peut nous aider à mieux produire. La pression fiscale et parafiscale est forte » soutient Eugène Koffi. Il assure que 90% des médicaments vendus en Côte d’Ivoire provient de l’extérieur, révélant « 60 ans après les indépendances, des difficultés de création de l’industrie pharmaceutique locale. » Dr Arouna Diarra, le président du Conseil de l’Ordre des pharmaciens de Côte d’Ivoire, s’est voulu plus incisif : « il faut un accompagnement fiscal sincère, il faut aller plus loin dans l’exonération fiscale. »

Fiscalité, « un crucial problème »

Dr Ouattara Kanigui, au nom de l’Union nationale des pharmaciens de Côte d’Ivoire estime pour sa part que la pression fiscale est « cruciale ». La pandémie de la Covid-19 a mis à nu les faiblesses endogènes du système. Selon Professeur Bamori Dembélé, le secteur des biologistes, est « sinistré », en dépit « d’une demande croissante de laboratoires qui voudraient s’installer mais il y a le problème de la fiscalité qui se pose. » Et d’expliquer que l’annexe fiscale de 2021 comportait une « réforme des PME » avec deux objectifs : faire comprendre l’impôt au contribuable et baisser la pression fiscale. Au final on a assisté à un renchérissement de la pression fiscale avec une hausse de 93% du paiement des impôts pour l’ensemble des officines du pays. Toute chose qui suscite le mécontentement du président de la fédération des PME ivoiriennes, Dr Brou Arsène qui menace : « cette fois-ci, on ne va pas laisser faire sur l’annexe fiscale 2024. Nous sommes fatigués, il faut élargir l’assiette fiscale, les pharmaciens n’en peuvent plus. » Cette pression fiscale empêche, selon Dr Yacine Fofana, l’investissement dans la recherche scientifique qui aboutit à une industrialisation forte comme dans les pays développés.

594 milliards FCFA à récolter…

Selon Aboubacar Ouattara, qui a pris part à deux séminaires gouvernementaux au cours desquels le patronat ivoirien a eu l’opportunité de présenter ses attentes sur la fiscalité,  le 1er  chantier date de l’année 2014 et le second, de 2022.

« Pour la fin d’année 2024, le patronat a transmis au gouvernement, 03 points majeurs qui sont entre autres ; la question des contrôles fiscaux qui doivent se faire de manière courtoise, la bonne gouvernance par une utilisation efficiente et efficace des recettes qui sont générées par le secteur privé, et l’élargissement de l’assiette fiscale » a-t-il argumenté. « 2024 sera beaucoup plus dure que 2023 pour chaque pharmacien et pharmacienne, car l’Etat a signé un programme économique et financier avec les bailleurs de fonds et s’est engagé à augmenter les recettes fiscales de 594 milliards FCFA. La pression sera forte, car le budget passera de 12000 milliards à 13000 milliards. En l’absence donc de la prise en compte du souhait exprimé de l’élargissement de l’assiette fiscale, chaque contribuable ivoirien paiera encore…un peu plus aux impôts.

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