Côte d’Ivoire : Nouvelle ruée des banques vers Bouaké
Après des années d’absence, le secteur bancaire s’anime à Bouaké, deuxième ville ivoirienne, considérée comme un grand centre économique d’échanges vers le Burkina Faso et le Mali. Seize établissements bancaires, dont la nouvelle Banque Malienne de Solidarité, s’y disputent un marché dopé par le retour de la BCEAO.
BDU, Diamonds, BNI (Banque nationale d’investissement), SIB (Société ivoirienne de banque, groupe Attijariwafa Bank, Maroc), Banque Atlantique, SGBCI, Orabank, Nsia Bank, CNCE, Ecobank, Bicici et dans quelques semaines la BCEAO (Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest)…
En tout, seize établissements bancaires, dont la nouvelle Banque Malienne de Solidarité (BMS), se sont installés à Bouaké. Deuxième ville ivoirienne, Bouaké est aussi surnommée la « deuxième malienne » avec « au moins 2.5 millions de maliens », selon le consulat du Mali à Bouaké, ce qui en fait la plus grande ville malienne – hors Mali – au monde.
Un fort potentiel économique
Bouaké représenterait 758 millions de dollars US, soit 3% du PIB ivoirien, et occuperait la 3è position au plan économique après Abidjan et San Pedro – à en croire le rapport de juillet 2013 de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI-CI) remis au Président Alassane Ouattara.
Sa population – composée de commerçants, transporteurs, artisans et d’une forte diaspora malienne – génère une manne financière que les opérateurs bancaires cherchent à capter. Selon Kanté Abdoulaye, président des banquiers de Bouaké, « c’est un minimum de 6 milliards 400 millions FCFA par jour qui circule dans l’économie de la ville ».
C’est aussi pourquoi la BMS a décidé de s’implanter en Côte d’Ivoire et y a ouvert, en dehors d’Abidjan, sa première agence à l’intérieur du pays, vers le marché de gros. Ce nouvel arrivant montre le potentiel économique du secteur après des années marquées par la crise.
La BCEAO dope le marché
Contrainte de fermée pendant la crise, dont les pillages avaient entraîné une perte de plusieurs milliards de FCFA, la BCEAO rouvre dans quelques semaines à Bouaké. C’est peut-être ce retour qui dope le marché, selon Charles Dutauziet, chef d’agence de la SIB.
« Les transferts de fonds vers Bouaké coûtent 600 mille FCFA par convoi. Donc toutes les banques ne pouvaient pas se permettre de payer. C’est la reprise des activités de la banque centrale, la BCEAO à travers son agence reconstruite, qui favorise l’arrivée de nouvelles banques ici, et c’est bon pour l’économie. Cela indique que Bouaké a du potentiel et ce sont des emplois qui se créent » soutient le chef d’agence.
Il précise aussi que « pour qu’une banque s’installe dans une ville, une étude de marché et d’activités se fait au préalable. La commission bancaire estime qu’il y a du potentiel à Bouaké et que les activités reprennent progressivement. Ainsi, l’ouverture prochaine de la BCEAO explique-t-elle assez aisément le déferlement des banques. »
Le retour de la confiance
Si le retour de la paix pousse les banques à revenir, pourrait-il annoncer une très forte concurrence et de nouvelles batailles économiques ? « Non, il n’y pas de prime abord de guerre des banques à Bouaké » répond Charles Dutauziet pour qui « la différence se fera plutôt au niveau de l’offre. »
Pour le Dr Séraphin Prao Yao, enseignant-chercheur en Economie à l’Université Alassane Ouattara de Bouaké, c’est surtout le retour de la confiance qui permet au marché de se développer et de rendre à Bouaké toute sa place dans l’économie du pays.
« Bouaké, c’est la troisième ville de la Côte d’Ivoire, donc logiquement dans un souci d’extension de leur réseau, les banques doivent non seulement être présentes à la capitale économique, Abidjan, mais elles doivent être présentes ici. Des commerces s’ouvrent. C’est à l’honneur des banques d’être présentes aux côtés de ces opérateurs économiques qui veulent faire encore confiance à Bouaké pour qu’elle redevienne un poumon de notre économie ivoirienne. »
Auteur Issiaka N’guessan // Photos : Mairie de Bouaké et Agence BCEAO © Mairie de Bouaké