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Côte d’Ivoire, la TNT ouvre l’espace audiovisuel

La RTI, le groupe de média de l’État ivoirien, ne sera plus seule sur l’espace audiovisuel national. La nouvelle libéralisation du secteur ouvre cette année la filière à de nouveaux diffuseurs, et ce grâce à la TNT. Reste aux investisseurs et publicitaires à trouver leurs places dans un marché encore très jeune et peu dimensionné.  

 

Life TV de Voodoo communications, Optimum média avec sa chaîne TV7, Sorano TV, ou encore Afrique + seront les futurs concurrents du groupe de média historique Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI). Chacun se positionne sur des offres spécifiques – divertissement, information, séries… – pour mieux capter les futurs téléspectateurs. Cette nouvelle donne est permise grâce à l’avènement de la TNT, la Télévision Numérique Terrestre, lancée à Abidjan cette année, et qui promet de bientôt couvrir l’ensemble du territoire pour mieux attirer les investisseurs.

 

Un nouveau régime juridique 

 

C’est à la deuxième session ordinaire 2016 que le projet de loi portant sur le régime juridique de la communication audiovisuelle a été présenté aux députés ivoiriens. Le commissaire du gouvernement pour le texte était alors Affoussiata Bamba-Lamine,  l’ex-ministre de la communication. « Le corollaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme du 10 décembre 1948 est la liberté d’opinion et d’expression – qui est un droit pour chacun d’utiliser librement les médias de son choix pour exprimer sa pensée,  la communiquer à autrui ou pour accéder à l’expression d’autrui » a-t-elle indiqué. Cette exigence générale se décline en 7 projets législatifs qui, pour l’ancienne Ministre, visent « sur un plan formel, à offrir une nouvelle architecture pour le secteur » et à favoriser  « les activités de communication audiovisuelle » notamment par la création des canaux TNT.

 

RTI, crainte de la concurrence 

 

Selon Benoît Yeo, Directeur général adjoint de la RTI, chargé de la technique,  « le plus grand avantage avec la TNT, c’est que l’ouverture à la concurrence doit offrir des diffusions plus qualitatives : on a déjà la TNT sur Abidjan, et la qualité est de mise. » Mais, il craint toutefois l’avènement des nouveaux opérateurs, qui arrivant sur un marché jadis en situation de monopole absolu depuis 1963, vont devoir « se partager le gâteau publicitaire… et  on ne peut en être satisfait. » En effet, dans un contexte de chute drastique des subventions publiques dotées pour la RTI, qui ont parfois diminué de 80% par rapport à certaines années, Benoît Yeo mise sur la différenciation des contenus : « pour s’en sortir, il faudra marquer la différence par la qualité de la diffusion mais surtout par la qualité des futures productions. »

 

Les investissements 

 

Comme l’explique le Directeur général adjoint, la TNT implique aussi des investissements liés à la technique pour l’accès aux images, tant pour les diffuseurs que pour les spectateurs. Ce volet doit donc générer aussi une économie à part entière, avec des frais pour le gouvernement qui « a créé un comité  national de la migration vers la TNT. » Mais puisque les investissements ne sont pas du ressort de la RTI, Benoît Yeo précise que « l’État recherche encore son partenaire technico-financier qui aura 51% des parts, et lui 49% pour la création de la société de diffusion. »

 

L’offre publicitaire 

 

Dominé par la téléphonie mobile avec Orange en tête  (2.7 milliards FCFA en 2014), les annonceurs auront désormais le choix pour leur communication en télévision. « Nous pourrons mieux négocier les tarifs, varier les cibles et les supports » se satisfait Mouftaou Adjibade, expert en veille stratégique et chargé d’études chez Océan Ogilvy Côte d’Ivoire. Peut-être sous-estimé, en l’absence d’études plus approfondies du secteur, l’expert précise que dès 2015 « le marché de la publicité en Côte d’Ivoire avoisinait déjà 29 milliards FCFA. »  De quoi motiver les nouvelles chaînes de télévision et expliquer que plus de 60 agences-conseil pullulent déjà sur le marché.

 

Pour autant, Mouftaou Adjibade admet volontiers que si la TNT doit aider à faire grandir la filière audiovisuelle, cette arrivée de nouvelles chaînes de télévision n’est pas à l’avantage de la RTI. « Elle captait beaucoup de publicité,  pour elle, ce ne sera pas intéressant. » Une confirmation, peut-être, du bien-fondé des interrogations que traverse le groupe historique.

 


 

Auteur : Issiaka N’Guessan // Photo : Siège de la RTI – © Getty Images – Issiaka N’Guessan

 

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