CEMAC : l’Union européenne cherche à convaincre
Les pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) refusent d’adhérer à l’accord bilatéral Cameroun-UE, comme le proposaient Yaoundé et Bruxelles, malgré une réunion collective le 3 Mars dernier à Douala.
Les États de la sous-région Afrique centrale avancent désormais en rang serré. Le constat a été fait le 3 mars à Douala, pendant la seizième réunion du Comité des ministres en charge des négociations de l’Accord de partenariat économique (Comina). Une session décisive ayant permis aux cinq autres pays (Centrafrique, Gabon, Tchad, Congo Brazzaville, Guinée Équatoriale) de la Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale (Cemac) et à la République démocratique du Congo (RDC), de rejeter la proposition d’adhésion à l’accord bilatéral Cameroun-Union européenne, émise par Yaoundé et Bruxelles, dans une correspondance adressée au président de la Commission de la Cemac datée du 20 janvier 2017.
Un accord solitaire
L’Accord de partenariat économique (APE) entre le Cameroun et l’Union européenne (UE) a pris corps le 4 août 2016. Cette date marque en effet le début du démantèlement des barrières douanières sur les importations du Cameroun en provenance de l’UE. Ce démantèlement tarifaire concerne les produits du premier groupe constitués de 1760 lignes tarifaires (produits destinés à la consommation des ménages 30%, matières premières 19%, et biens d’équipements 27%).
Sous la pression du partenaire européen, Yaoundé a invité les autres États du bloc régional à adhérer à son accord d’étape. Sans succès. A en croire le journaliste camerounais spécialiste de l’APE, Aboudi Ottou, cette démarche de son pays visait « à sauver l’union douanière de la Cemac mise en mal par la décision de Yaoundé de conclure et de mettre en œuvre en solitaire un APE avec l’UE ».
Le courrier de l’UE
Les négociations pour un APE régional Afrique centrale-UE avaient été interrompues par Bruxelles en 2011. Le 27 octobre 2016, Yaoundé avait reçu un courrier cosigné de Neven Mimica et Cecilia Malmström, respectivement commissaires européens au développement et au commerce, dans lequel Bruxelles souhaitait que le Cameroun amène les autres pays de la zone à rejoindre sa position : « Nos services sont à votre disposition pour étudier avec vous les modalités d’adhésion à l’accord d’étape qui est mis en œuvre actuellement entre l’UE et le Cameroun ».
Bruxelles précise par ailleurs qu’il ne s’agit pas de relancer les négociations interrompues depuis six ans, mais de discuter le texte d’un nouvel accord. Un nouvel accord qui nécessite forcement de nouvelles clauses, selon les experts de l’Afrique centrale. A Douala, le Comina a décidé de reprendre contact avec l’UE, pour poursuivre les négociations. « Nous voulons reprendre les négociations, et nous allons donc reprendre les négociations », a déclaré Louis Paul Motaze, le ministre camerounais en charge de l’Économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat).
Des marges de négociations
Alors que la matérialisation de son accord commercial avec l’UE n’est qu’à son début, le Cameroun signale toutefois des pertes budgétaires. Le manque à gagner est estimé à 100 millions de FCFA par mois, soit 700 millions en sept mois. Une situation qui n’augure pas des lendemains meilleurs. Pendant plus de 5h d’horloge, le Minepat et ses homologues de la sous-région, ont tablé sur une position commune visant à conclure un APE régional, bénéfique à tous.
Pour avoir étudié la question à fond, Pascal Youri-Lagha, commissaire du département du marché commun de la Commission de la Cemac et président du comité ministériel des négociations des APE, pense que pour parvenir à un APE d’une telle envergure, l’UE doit réunir toutes les conditions relatives : entre autres le financement du Programme régional d’accompagnement du développement (Prada) et le renforcement des capacités productives de l’Afrique centrale.