BADEA : en croisade en faveur des PME
AGF, BOAD, African Risk Capacité... La Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) multiplie les partenariats pour relever le défi qu’elle s’est lancé en 2021 : constituer une coalition en faveur des PME.
Il faudra mobiliser, selon le FMI, près de 285 milliards de dollars d’ici 2025 pour pallier les déséquilibres économiques post-Covid. Des fonds à ajouter aux financements nécessaires au développement du continent dont 100 milliards de dollars seulement pour les infrastructures en Afrique. Un défi dans lequel le secteur privé doit jouer un rôle clé. Or qui dit secteur privé en Afrique, dit PME. Ces dernières, pour assumer leur mission, ont besoin de près de 330 milliards de dollars. Seuls 20% sont à ce jour financés par les banques.
Avec une économie qui tourne majoritairement dans l’économie informelle et un faible taux de bancarisation, le défi qui incombe au secteur bancaire africain est majeur. Si l’essor de la FinTech apporte des solutions concrètes à ce double défi, seule une implication, réelle, de l’ensemble des acteurs concernés, à savoir les acteurs publics, le secteur privé et les consommateurs, aux côtés des institutions financières nationales et régionales pourra changer la donne.
Une « coalition globale » en faveur des PME
C’est toute l’ambition de la démarche entreprise par la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA). Institution créée en 1973 et détenue par 18 pays arabes qui a vocation à participer au financement du développement économique des pays africains. A l’occasion de la deuxième édition de son forum sur le commerce entre pays arabes et africains, en novembre 2021 au Caire, elle annonçait le lancement d’une « coalition globale » en faveur des PME africaines. Autrement dit, l’Institution a invité ses pairs_ une trentaine d’institutions financières du continent et du monde arabe, à faire des PME africaines une priorité. En particulier dans ce contexte post-Covid 19.
« Si bon nombre de leaders africains se sont engagés à promouvoir les jeunes et les femmes entrepreneurs afin de libérer le potentiel d’innovation (…), la pandémie de Covid-19 [a mis] à rude épreuve les MPME, dont le nombre est estimé entre 85 et 95 millions sur le continent et qui est une catégorie composées à 86 % de microentreprises comptant environ dix employés » a rappelé à cette occasion le Dr Sidi Ould Tah, Directeur Général de la BADEA. « Avec la covid-19, il y a eu une grande érosion de nos profits, aussi bien au niveau des PME qu’au niveau des grandes entreprises, et parfois même au niveau des États », a pour sa part souligné l’économiste Carlos Lopes.
La coalition globale impulsée par la BADEA doit précisément créer des synergies entre pays africains et arabes et apporter des solutions, financières, concrètes aux problématiques rencontrées par les PME. Parmi les initiatives menées, l’Agence de développement de l’Union africaine (Auda-Nepad), avec le soutien d’Ecobank et l’engagement de nombreux autres acteurs, dont la BADEA, a notamment lancé en mai 2021 une campagne intitulée « 100 000 MPME », qui a pour objectif de créer un million d’emplois sur les trois prochaines années. À terme, c’est quelque 440 millions d’emplois qu’il s’agirait de générer en dix ans.
Cette coalition est la seule qui soit en capacité de réunir des acteurs prêts à s’engager aux côtés des PME avec un focus particulier sur les femmes et les jeunes
Une initiative à encourager selon le président fondateur du cabinet de recrutement AfricSearch, Didier Acouetey, par ailleurs initiateur de l’Africa SME Champions Forum lors duquel il développe ses analyses. « En Afrique, on sait pertinemment que les marchés financiers ne sont pas assez profonds en termes de liquidité et qu’ils ne connaissent pas suffisamment leur tissu local de PME, ce qui affecte par ricochet la confiance en ces entreprises. La difficulté est donc double, tant du côté des PME que sur le front des marchés, observe-t-il avant de préconiser : il nous faut raisonner en termes de coalitions. En 2019, nos partenaires de la Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique (BADEA) ont pris l’engagement de porter ce programme de coalition de soutien aux PME, qui a du reste fait l’objet d’un forum dédié au Caire en novembre. Les différents acteurs de cette alliance que sont les banques de développement, les fonds de garantie, les banques d’investissement, les banques commerciales et les fondations pourront alors discuter d’un programme cohérent d’appui, où chaque membre jouera son rôle. Un vrai changement car jusqu’à maintenant, chaque acteur prenait des initiatives de manière isolée. Dans ce contexte où l’on manque de visibilité, cette coalition est la seule qui, selon moi, soit en capacité de réunir des acteurs prêts à s’engager aux côtés des PME avec un focus particulier sur les femmes et les jeunes. »
Un engagement renouvelé
Un engagement renouvelé lors de la dernière édition d’Africa SME Champions forum, en octobre à Lomé. La Badea, principal partenaire de la rencontre, a réitéré son engagement en faveur des PME africaines. Ce qui se traduit par une enveloppe de 10 milliards de francs CFA (15,2 millions d’euros) au profit des PME togolaises.
Cette enveloppe s’accompagne d’un deuxième financement de 200 millions de francs CFA (près de 304 000 euros) issu de l’African Guarantee Fund (AGF), fonds africain de garantie basé au Kenya. Cette somme ira à l’assistance technique des PME. Au-delà, elle multiplie les partenariats et poursuit sa « coalition » pour soutenir les PME africaines.
Les PME sont au cœur de la stratégie de la BADEA
« Cette 8e édition de l’Africa SME Champions Forum constitue un jalon important de la coalition lancée par la BADEA et ses partenaires. L’idée : réunir autour d’une même table toutes les institutions intéressées par les PME », souligne le président de la BADEA, Sidi Ould Tah, en précisant : « Au sein de l’espace UEMAO, les PME représentent 95 % des entreprises recensées ». Or celles-ci sont aujourd’hui reconnues comme des acteurs majeurs dans la réalisation des objectifs de développement durable, mais aussi dans leur capacité à créer des emplois et réduire la pauvreté. Les PME sont donc « au cœur de la stratégie de la BADEA », qui les accompagne par le biais de divers instruments, tout en multipliant les partenariats « pour fédérer les contributions de chacun afin de risquer les investissements en faveur des PME ». Et l’économiste mauritanien de conclure : « La BADEA continue son plaidoyer pour la coalition en faveur des TPE et PME africaines afin que tous les acteurs intéressés puissent joindre leurs efforts à travers une approche holistique et résoudre les différents problèmes auxquels font face les PME ». La finalité étant l’employabilité des jeunes.
Pour en savoir plus : https://www.badea.org