Afrique-France entrepreneurs : bilan et défis après la première année
Voilà un an que Afrique-France entrepreneurs, la communauté business formée entre les deux rives de la Méditerranée, est née pour une “approche à 360°”. La dernière édition de Big, le RDV annuel des entrepreneurs de BPI France, était l’occasion d’en dresser le bilan.

Par Mérième Alaoui, à Paris
L’idée est née à l’issue du nouveau sommet Afrique-France de Montpellier, entre les entrepreneurs africains et la French Tech défendue par le président de la République lui-même, Emmanuel Macron. En marge de cette initiative, les principaux acteurs du business français se sont réorganisés pour un travail collaboratif. “Cet alignement d’acteurs à savoir Expertise France, AFD-Proparco, Business France et Digital africa, est historique. Nous espérons que de cette collaboration entre les partenaires français et africains naîtra le premier jalon majeur du partenariat français et africains” explique Stéphane Allou, directeur administratif et financier de Digital Africa, rattaché à Proparco.
A travers une plateforme en ligne, il s’agit de mettre en relation les membres d’une nouvelle “communauté” composée d’un côté de ces acteurs français, et de leur réseau d’environ 300 entrepreneurs de leur portefeuilles. De l’autre des patrons africains et des partenaires locaux. Concrètement il s’agit d’organiser du networking à travers des sessions d’échange et autres webinaires sectoriels toutes les trois semaines, voire de matching be to be. Dans l’objectif de connecter les deux écosystèmes à long terme. A ce jour, les points de contact via la plateforme, ont été établis dans 44 pays africains.
Les échanges entre les entrepreneurs africains et français ont donné lieu à plusieurs reproches, ou plutôt des besoins de la part des Africains. On a noté par exemple, le manque de lisibilité
“Chez Business France, nous sommes un peu des marieurs, le Meetic de l’export, puisqu’on met en relation de manière qualifiée, des entrepreneurs pour développer du business et ce, grâce à nos 13 équipes africaines qui connaissent le réseau local et donc les opportunités pour les connecter avec les entreprises françaises. Notre réseau de 200 chargés d’affaires en France regroupe 20 000 entreprises” souligne Michel Bauza directeur Afrique du nord de Business France.
Ce rapprochement organisé est aussi le fruit de plusieurs bilans. Et de mises au point franches. “Les échanges entre les entrepreneurs africains et français ont donné lieu à plusieurs reproches, ou plutôt des besoins identifiés de la part des Africains. On a noté par exemple, le manque de lisibilité, on nous demande souvent : qui fait quoi ?” explique Ann-Marème Atayi, cheffe de projet Afrique-France entrepreneurs chez BPI France, et modératrice du débat-bilan de la structure. Pour pallier ce défaut, la plateforme a pour principal objectif de faciliter la compréhension du parcours de financement et d’accompagnement, à tous les niveaux. Stephane Allou rappelle par exemple le rôle de Digital Africa : “notremission est de soutenir les acteurs du numérique africains dans leur capacité à concevoir et déployer des outils numériques à destination de l’économie réelle. De façon très concrète nous finançons des projets dès le “early stage” donc la phase d’amorçage. Proparco finance lui, des entreprises qui sont déjà plus établies et donc il manquait ce jalon de financement. Nous venons combler ce vide avec des tickets d’investissement à partir de 20 000 € allant jusqu’à 500 000 €” détaille-t-il.
La réflexion autour du financement panafricain est aussi avancée dans plusieurs pays.
Avec l’idée, à chaque fois, d’être dans la co-construction avec les parties prenantes africaines car il s’agit de pérenniser
Pour faciliter d’autant plus cette lisibilité vue d’Afrique, il s’agit de développer les relais locaux. Le réseau a ainsi mobilisé les différentes communautés à travers les ambassades, les clubs d’entrepreneurs rattachés, mais aussi les réseaux des initiatives comme la French Tech, Meet africa, Choose Africa ou encore les diverses accélérateurs sur le continent. “Danschaque pays, nous avons identifié des partenaires : des incubateurs, des chambres de commerce, des agences publiques qui travaillent sur l’investissement, les patronats…” détaille Habiba Addi, responsable des programmes entreprenariat pour Expertise France. Mais encore faut-il développer les relations avec les institutions. C’est le rôle particulier d’Expertise France, opérateur français de mise en œuvre des projets.
“Nous sommes des opérationnels de la coopération. Concrètement en Afrique, nous intervenons au niveau étatique donc au niveau des politiques publiques dans chaque pays. Avant cela, il faut identifier les besoins de développement. Par exemple, nous avons appuyé le Startup Act en Tunisie et sommes en train de faire de même au Sénégal” poursuit Habiba Addi. En plus de l’identification des besoins et des solutions, il s’agit d’intervenir au niveau des écosystèmes des entrepreneurs, donc les politiques de financement. “Par exemple, nous avons lancé des fonds de prêts d’honneur ou d’avances remboursables”. La réflexion autour du financement panafricain est aussi avancée dans plusieurs pays. “Avec l’idée, à chaque fois, d’être dans la co-construction avec les parties prenantes africaines car il s’agit de pérenniser” appuie la responsable d’Expertise France.
Autant de partenariats locaux, symbolisés par des lancements de l’initiative dans certaines capitales comme à Nairobi, Abidjan, Casablanca et prochainement, à Johannesburg, Accra et Lomé entre autres annonces.

Pour un investisseur africain qui s’intéresse à l’Europe, nous avons la capacité de lui dérouler un tapis rouge et de l’aider à s’investir en France avec des incubateurs
Les acteurs du financement français sont d’autant plus confiants qu’ils veulent aller encore plus loin. “Pour projeter un maximum d’entrepreneurs français dans le monde et en Afrique, qui est le continent du 21ème siècle” précise Michel Bauza. Et d’annoncer la mise en place d’un fond, géré par BPI, “100 millions d’euros impulsé par le président de la République au forum mediterannéen de Marseille pour faciliter les projets d’entreprise françaises, notamment de la diaspora, en Afrique du nord. Il est évident que dans la conjoncture actuelle autour des migrations, on voit bien l’intérêt d’aller créer de la valeur et de l’emploi”.
“Mais quand on parle de co-développement cela va dans les deux sens. D’Europe vers l’Afrique mais aussi d’Afrique vers l’UE qui est tout de même le premier marché mondial. Pour un investisseur africain qui s’intéresse à l’Europe, nous avons la capacité de lui dérouler un tapis rouge et de l’aider à s’investir en France avec des incubateurs” tient à nuancer le directeur Afrique du nord de Business France.
Et d’annoncer la multiplication de forums sur la thématique de France 2030, qui rappelle l’ambition du pays à être le champion de la décarbonation, de la transition énergétique ou encore de l’industrie de la connaissance. “A nous d’être suffisamment malins et inclusifs pour réunir tous les acteurs qui peuvent amener quelque chose à la communauté des entrepreneurs français et africains” prévient-il.
Pour en savoir plus : https://www.euroquity.com/fr/communaute/afrique-france-entrepreneurs