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Culture/ Livre : Minana Kondé “Radis Noir sera malheureusement toujours d’actualité, car la discrimination et le racisme ont encore du chemin en France…”

“Radis noir” qui connait ces derniers temps une malheureuse actualité, est un essai de la franco-guinéenne, Minana Kondé, alias Minako. L’œuvre à forte résonance autobiographique, invite à la réflexion sur un certain nombre de sujets de société franco-africains.

Par la rédaction

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je suis originaire de la Guinée. J’ai grandi en France et étudié le Droit à l’Université de Lille, la Comptabilité au Cnam de Lille, le Management International de l’Entreprise à l’EDHEC Business School de Lille, enfin la Diplomatie et les Relations Internationales à l’École de Politique Africaine de Nanterre. J’ai grandi avec mon grand-père officier militaire et ma grand-mère femme au foyer. J’ai reçu une éducation africaine et disons, partiellement européenne.

Comment est née l’idée de ce livre ? Quel était votre objectif au départ ?

Elle est née de la volonté de soulever des thématiques cruciales que vit notre société actuelle, notamment la Diaspora Africaine en France. L’objectif au départ était d’écrire un pamphlet autobiographique, ensuite je l’ai muté en un récit exclusivement autobiographique, tout en conservant le même fil conducteur.

D’où le format, une série de questions, au sens littéral, que vous partagez avec les lecteurs sur les questions de société comme le racisme, les discriminations, l’islam… ?

En fait, j’invite le lecteur, au travers d’un style volontairement enfantin et original dans Radis Noir à se poser des questions. On pourrait ainsi penser que ce sont des questions que je me pose. Ce n’est pas le cas. Ce sont des questions que je pose aux lecteurs, afin de les inviter à réfléchir sur une variété de sujets.

Il y a des questions dans lesquelles je ne suis pas induite, mais les lecteurs oui. C’est donc un livre écrit, avec la volonté de s’adapter à tous les lecteurs, afin que chacun puisse s’y retrouver et s’interroger. Donc les questions ne me concernent pas directement. A titre d’exemple, lorsque je dis peut être qu’un jour les tropiques seront moins tropicaux, à ce moment pourrais-je y vivre, pourrais-je supporter une chaleur extrême…(Sahara)… Pour ma part, je suis habituée à l’Afrique depuis l’enfance, mais cela n’est pas le cas de tous les Africains vivant en France.  Tous n’ont pas eu cette chance de connaître leur terre d’origine. Et je souligne cette importance fondamentale pour tout un chacun de connaître fondamentalement ses origines.

Des questions que vous adressez à qui alors ?

Des questions que j’adresse à tout un chacun, aux lecteurs, aux politiques, au racisme, à l’islamophobie…, des questions qui amènent à réfléchir, à se poser les bonnes questions, à s’interroger en vue de se découvrir et/ou de se redécouvrir, au travers des questions et de penser différemment. J’invite ainsi le lecteur à s’ouvrir à lui-même, afin de faire rejaillir le meilleur de lui-même.

L’actualité donne, malheureusement, une résonance particulière à votre livre : une fois de plus en France la question des discriminations se pose avec violence…

En effet, et la dernière phrase du livre en son écrit premier était « Madame Le Pen peigne, Monsieur Le hérisse Zemmour arrêtez-vous ou mariez-vous, ou plutôt chute la France va mal ».

Radis Noir est ainsi effectivement, un livre d’actualité et qui sera malheureusement toujours d’actualité, car la discrimination, le racisme ont en France, un long chemin et continuent de prospérer. Pire, le racisme est encouragé. Et c’est ainsi que les voix du Fn-Rn et de « Reconquête » ne cessent d’augmenter.

Qu’est-ce qu’il faut pour y remédier ? Faut-il tout changer ?

Le système français actuel exclut totalement une partie de la population qui n’est pas reconnue comme Française, mais comme étrangère, malgré la nationalité française. En effet, il est bien vrai que la nationalité n’est qu’un document et cela est une réalité à toute épreuve.

Les populations immigrées et descendantes d’immigrées sont en grande partie rejetées. Seules des exceptions confirment la règle.

Les habitants des quartiers, des zones « Zep » ont rarement un niveau commun aux autres français. Ils sont vraisemblablement exclus du marché de l’emploi ou bien sont obligés de se contenter de petits boulots qui ne les font pas prospérer ou à défaut, de se résoudre à vendre de la drogue.

Peut-on fustiger une population que l’on exclut de la société et que l’on a mis sous enclos que sont les cités.

Les seules solutions sur le court terme sont de refonder l’institution de la police qui est censée protéger et non tuer les populations.

Les seules solutions sur le court terme sont d’interdire le contrôle au faciès dont sont victimes les populations visées.

Les seules solutions sur le court terme sont de revoir les méthodes d’arrestations françaises, afin qu’il n’y ait plus de George Floyd français.

Les seules solutions sur le court terme sont de revoir entièrement le fonctionnement de la police française afin qu’il n’y ait plus de morts.

Maintenant, les solutions sur le long terme sont le désenclavement des cités enclavées françaises. On ne peut reprocher à une population d’être communautaire lorsqu’on l’encercle dans un enclos commun.

Les solutions sur le long terme sont d’apporter une éducation nationale commune dans les Zones Zep de même qualité que celles dans les Zones standards ou huppées. Car, en effet, force est de constater que le niveau n’est pas le même, les enseignants ne sont pas les mêmes, les cours dispensés sont de moindre qualité.

On ne peut reprocher à une population un manque d’éducation lorsque l’éducation qu’est censée leur apporter l’école, est de qualité moindre.

On ne peut fustiger les parents qui pour certains ne savent ni lire ni écrire pour aider leurs enfants, mais bien remédier à cela en leur apportant des cours d’alphabétisation et en faisant bénéficier aux écoles de Zones Zep des cours du soir compris dans leur agenda scolaire, afin de relever leur niveau et donc leur chance de s’en sortir.

Aussi, les solutions sur le long terme sont de leur donner un travail. Car étudier ne suffit pas à s’en sortir. Il faut qu’ils aient des formations de qualité et en lien avec le marché de l’emploi, afin de les intégrer complètement dans la société. Et ceux qui ont le niveau pour des études supérieures, il faut les accompagner à poursuivre leurs études à travers un système d’accompagnement financier et d’orientation vers des études supérieures pourvoyeuses de débouchés certains. Ce système induit qu’ils puissent effectivement être embauchés à l’issue de l’obtention de leurs diplômes.

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