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Côte d’Ivoire – L’intégration régionale par les routes

Dans le cadre communautaire de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest), les transporteurs et opérateurs économiques de la filière bétail mettent tout en œuvre pour créer les conditions de l’intégration régionale. Reportage à la Gare STC de Abidjan-Treichville, où les bus sont estampillés de la mention « libre circulation. »

Gare de la compagnie de transport ghanéenne STC à Abidjan-Treichville : sur les parebrises des autocars, un autocollant ne manque pas d’attirer l’attention du voyageur ou de l’observateur. Il y est mentionné « libre circulation » avec le drapeau ivoirien et le symbole de la CEDEAO, l’institution politique et économique régionale créée en 1975. Sacs de riz, papiers hygiéniques, huile, boissons made in Côte d’Ivoire figurent dans les bagages des voyageurs. Un symbole d’intégration économique.

Libre circulation des biens et des personnes, une réalité

La compagnie STC, l’une des premières dans la sous-région à avoir intégré le « mécanisme régional de suivi de la libre circulation » reçoit des agents des douanes ivoiriennes, de la police, de la gendarmerie, des Eaux et Forêts. Sur le quai, ils font les contrôles nécessaires et scellent les coffres des autocars avant le départ et ce, jusqu’à destination d’Accra (Ghana) ou de Cotonou (Bénin).

Selon Sawadogo Issaka, président du conseil d’administration de la Sococib à Abidjan et de la confédération africaine de la filière bétail et viande de l’Afrique de l’Ouest, « les balles de coton du Burkina Faso et du Mali font fonctionner les ports d’Abidjan et de San Pedro…et les choses sont en voie d’amélioration. Avant, entre la frontière Burkina Faso-Côte d’Ivoire, sur 30 Km, les transporteurs dépensaient 120.000 FCFA, mais avec les difficultés constatées et les mesures prises, les dépenses se limitent aujourd’hui à  30.000 FCFA. »

Pour le président de la Sococib, il s’agit d’une réelle amélioration pour le commerce : « Maintenant, les remorques vont vite, la circulation est fluide et le commerce se déroule bien »

« Le problème fondamental, les infrastructures routières »

Koné Vafi, Président de la Confédération des Conducteurs Routiers de l’Afrique de l’Ouest (CSCRAO) rappelle que le problème fondamental pour la connexion entre les peuples reste les infrastructures routières.

« Le transporteur est l’élément intégrateur, notre ambition, faire des 15 pays de CEDEAO, un seul pays. Avant les camions sénégalais ne venaient pas ici, aujourd’hui c’est le cas. Il y a au moins 50 camions sénégalais par mois en Côte d’Ivoire qui viennent charger de l’igname au marché de gros de Bouaké. En 2009, j’ai vu des ivoiriennes en Gambie pour y vendre des noix de coco et acheter du poisson séché… » Selon lui, les tracasseries étaient avant monnaie courante : « les transporteurs payaient 600.000 F de faux frais à la frontière malienne et 150.000 F pour un camion vide ; les sénégalais refusaient que les maliens chargent chez eux ; la frontière Ghana-Togo fermait à 18h… »

De même, Diallo Mamadou, qui représente les opérateurs économiques guinéens en Côte d’Ivoire évoque les progrès à faire entre son pays et Abidjan : « Entre la Côte d’Ivoire et la Guinée, il n’y a pas encore une bonne route… Mais depuis un moment, la Côte d’Ivoire y  travaille vers la frontière guinéenne, et la Guinée en fait de même vers la forêt de Lola. Et ce sont nos organisations qui incitent les deux gouvernements à construire… »

L’appui institutionnel, « contrôle juxtaposé »

Pour Louis Philippe Goly, Directeur en charge des politiques communautaires de commerce, de la libre circulation et du droit de résidence au ministère ivoirien de l’Intégration Africaine et des Ivoiriens de l’Extérieur, le projet phare doit être « l’autoroute régionale » qui se construit sur les corridors principaux.

« La Commission de la CEDEAO appuie cette dynamique par la mobilisation des ressources. Il y a l’installation des postes de contrôle juxtaposés afin de simplifier les opérations de contrôle. » Il estime aussi que « l’intégration parfaite est un idéal, mais qu’on peut déjà avoir un niveau d’intégration suffisant » en faisant par exemple la promotion de la« carte d’identité communautaire. »

Il rappelle aussi que dans une logique d’intégration régionale il est déjà délivré des agréments aux entreprises ivoiriennes pour vendre dans les autres pays sans payer de taxes douanières.  « Il y a beaucoup d’avantages à tirer de l’intégration régionale. Pour preuve, la Côte d’Ivoire est le 1er pays fournisseur en produits industriels dans l’espace CEDEAO et c’est aussi grâce aux détaxes. »

Les freins à l’intégration, une volonté politique

Si le développement des infrastructures routières et du commerce de fret illustre une certaine intégration régionale, nombreux sont ceux qui pointent encore du doigt le manque de volonté politique.

Comme le souligne Louis Philippe Goly, les acteurs des activités libérales ont encore des difficultés à s’installer dans les différents pays de la CEDEAO. Par exemple, les marchés communs tardent à se formaliser : « La monnaie unique, 20 ans plus tard n’est toujours pas une réalité. » Il déplore aussi les applications timides des accords : «  le protocole sur la libre circulation des personnes et des biens  date de 1979 dans la CEDEAO… seulement voilà, 37 ans après l’adoption de ce protocole, qui devait aider à la construction d’une CEDEAO des peuples, il ne connaît qu’une application timide. »

Et à Sawadogo Issaka de la Sococib de conclure dans son sens : « Quel est ce protocole signé et qui, 37 ans plus tard ne connaît toujours pas un début de mise en œuvre ? – Pour moi, c’est absolument un manque de volonté politique. »


 

Photo Issiaka N’guessan, légende : Conducteur et bus à la Gare STC Abidjan

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