A la uneLe dossier du mois

Reportage East African Community : un modèle d’intégration régionale ?

Avec un visa, des institutions communes et bientôt une même monnaie, l’Afrique de l’Est fait figure d’exemple en matière d’intégration régionale en Afrique. Grâce à ces infrastructures régionales des plus modernes, à commencer par ses routes, elles faciliteraient la circulation des biens et des personnes des pays membres. Africa News Agency a tenté l’expérience. 

 

Après avoir débarqué à Nairobi, pour notre première étape, nous rejoignons Mombassa, par la nouvelle ligne de train qui relie la capitale kenyane à la ville portuaire. L’achat du ticket se fait en quelques secondes via la plateforme M-Pesa. Après de minutieux contrôles des personnes et bagages, nous entrons dans la gare, des plus modernes. Le trajet, marqué par de sublimes paysages qui font la réputation du pays réputé pour ses safari, est l’occasion d’en savoir plus sur ce train « du développement ». (Voir le reportage vidéo ici).

Arrivés à Mombassa. « Salam » salutation d’usage à Mombassa, ville à majorité musulmane. Terre avant tout swahili le marqueur identitaire dominant dans cette ville à l’ identité multiple, legs des nombreuses puissances colonisatrices, où se mêlent mosquées, temples hindous et églises, témoins du brassage culturel de la ville. Véritable melting-pot, Mombassa est également une ville carrefour. Si un million de personnes y résident, des milliers d’autres y passent chaque année. Pour affaires, une séance de plage entre deux safaris ou traverser la région. Ce qu’elle n’aura jamais cessé d’être tout au long de son histoire. Un point de passage entre Orient et Occident, Afrique et monde arabe. Un legs gravé dans la pierre, sur les façades des édifices, d’inspirations européennes, africaines et des arts islamistes version Oman.

« 1 minute pour décharger, du bateau à quai »

Mombassa est aujourd’hui un pôle économique majeur, rythmé par le port de Mombassa, le premier de la région, pont entre l’Afrique de l’Est et du centre. 32 millions de tonnes de marchandises ont transité par Mombassa l’année dernière . « 1 minute pour décharger, du bateau à quai » précise un employé de Kenya Ports Authority (KPA). Une cadence imposée pour maintenir son positionnement, menacé par Dar es Salaam . D’où la mise en place du Guichet unique, du second terminal à conteneurs, du port dédié aux hydrocarbures…

 

Seconde étape de notre voyage. L’Ouganda, nous arrivons, en voiture personnel, par la route, dans la ville de Malaba. Un des points de connexion entre le Kenya et la frontière ougandaise. Des dizaines de camions attendent, en file indienne, aux abords du poste frontière. Nous devons nous acquitter de la somme de 500 Kenya shillings pour que notre conducteur puisse obtenir un GO Pass et nous faire passer, en voiture, la frontière. Après un long couloir, sur une piste plus que vétuste de deux ou trois kilomètres, nous arrivons au contrôle frontière. « Uganda » apparaît en toute lettre au-dessus du poste. Nous passons par le poste d’immigration récupérer le précieux tampon qui nous permettra de traverser la frontière et d’entrer en terre ougandaise. « Bonjour, où allez-vous ? Ginge. Pourquoi ? Nous sommes journalistes, nous réalisons une série de reportages sur l’Afrique de l’Est. Combien de jours allez-vous restez en Ouganda ? ». Des questions des plus banales posées avec la courtoisie qui fait la réputation des Ougandais. Nous disposons d’un visa de la Communauté de l’Afrique de l’Est obtenu sans difficulté à l’ambassade de l’Ouganda à Mombassa, pour 100$ par personne. En moins de cinq minutes, notre passeport est tamponné. Nous sommes autorisés à rentrer an Ouganda. Rien de plus ne nous sera demandé. Ni document ni argent.

 

« Entre 400 et 600 personnes et au moins 500 camions traversent tous les jours ce point de frontière »

 

Nous en profitons pour obtenir quelques informations sur la densité du trafic à la frontière. « Entre 400 et 600 personnes et au moins 500 camions traversent tous les jours ce point de frontière. » Sachant qu’il y en a d’autres, la frontière avec l’Ouganda et la Kenya se traverse à travers deux points de passage. 17h , nous quittons le poste frontière et entrons en Ouganda. Direction la station de Matatu, bus collectif locaux, pour rejoindre Ginge. Trois heures et des poussières nous arrivons au bord du Nil. Sur la route, toujours aussi bonne, nous retrouvons nos camions. «  Ils viennent de Mombassa. Ils sont chargés de conteneurs de ciments, alimentations et autres qui viennent au port depuis Dubaï » nous indique le chauffeur. Avec l’adoption du régime douanier unique, avec un seul et unique contrôle pour les marchandises, les temps de transit ont été réduit de moitié et les coûts d’acheminement de plus de 30 %.

 

Plus loin, des dizaines de groupes de singes attireront notre attention. «  Ils viennent sur le bord de la route pour obtenir de la nourriture ». Avec le dérèglement climatique, l’urbanisation, les animaux quittent la forêt vers les villes pour mendier de quoi se nourrir. Vert. Immensément vert. De part et d’autre de la route, des terres immenses. Des plantations de riz notamment pour ce pays gorgé d’eau. Des huttes traditionnelles en terre se mélangent aux maisons en pierre. Notre séjour en Ouganda peut commencer. Il se finira au Rwanda. Des voyages effectués par la route_ la région dispose d’infrastructures routières interrégionales de qualité_ en transport collectif, avec pour seul document demandé le visa de la Communauté de l’Afrique de l’Est.

 

Une monnaie commune en 2024, et la création d’une fédération politique en 2025

 

Initialement fondée en 1967, dissoute dix ans plus tard puis véritablement recréée en 2001, l’EAC, constituée de 5 pays membres ( le Burundi, le Kenya, l’Ouganda, la Tanzanie et le Rwanda), fait figure de modèle en matière d’intégration régionale. Alors que les pays d’Afrique de l’Est affichent les croissances les plus fortes du continent, avec des locomotives dont le Kenya, qui, avec ses infrastructures régionales, s’impose comme le hub régional, tandis que le Rwanda, véritable pépinière de start-up, se veut terre d’innovation. A l’inverse des autres organisations régionales africaines, ce sont les intérêts économiques qui ont donné naissance et continuent de dominer au sein de l’ East African Community.  Ainsi, malgré la prégnance des conflits, l’insécurité alimentaire qui menace, les épidémies également avec la résurgence d’Ebola, l’une des plus récentes organisations régionales a finalement été le plus loin dans le processus d’intégration régionale, avec une intégration douanière, commerciale, monétaire_ la monnaie commune de l’East African Community (EAC) est prévue pour 2024, et enfin politique, avec la création d’une fédération politique annoncée pour 2025.

 

 

 

 

Découvrez le dernier ANAmag intitulé « Diaspora, une expertise à valoriser » conçu en partenariat avec Expertise France

Articles similaires

Bouton retour en haut de la page