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Afrique du Sud : Une néo-colonie de l’Amérique néo-impériale

Dans cette nouvelle Cart’Afrik, Loyiso Mpeta, fondateur et PDG de Mshindi Bingwa Group Holdings, revient sur la rencontre Ramaphosa–Trump pour interroger l’héritage du colonialisme, les mécanismes de l’« empire néolibéral » américain et la position de l’Afrique du Sud au sein de ce système. Un texte stimulant qui remet en question les idées reçues et suscite le débat. *Loyiso Mpeta

La récente rencontre à la Maison Blanche entre le président Ramaphosa et Donald Trump continue de susciter débats et discussions sur les réseaux sociaux. Grâce à une approche de connaissance contre-hégémonique, Loyiso Mpeta a pu prendre du recul, laisser retomber le battage médiatique, et livrer son opinion sans filtre. Pour lui, cette rencontre reflétait avant tout le colonisé expliquant sa position à son maître impérial. Aujourd’hui, il semble nécessaire de placer le préfixe « néo » devant les termes de critique.

Destinée manifeste et émergence de l’Amérique néo-impériale

Dans cette nouvelle Cart’Afrik, Loyiso Mpeta, fondateur et CEO de Mshindi Bingwa Group Holdings, revient sur la rencontre Ramaphosa–Trump pour interroger l’héritage du colonialisme, les rouages de « l’empire néolibéral » américain et la position de l’Afrique du Sud dans ce système. Une tribune percutante qui remet en cause les idées reçues et invite au débat.

L’Amérique a une longue histoire de conquêtes coloniales, dont je ne rappellerai pas tous les détails ici. Ce que beaucoup ignorent, c’est l’idéologie et la croyance centrale qui sous-tend cette conquête. Avant que le darwinisme ne devienne une justification pseudoscientifique du racisme, de l’esclavage et du colonialisme, les Américains avaient la doctrine de la Destinée manifeste. Populaire dans les années 1840, elle affirmait que la conquête de l’Amérique du Nord était ordonnée par Dieu : destruction des peuples autochtones, des forêts et des bisons, drainage des marais, canalisations des fleuves et développement d’une économie reposant sur l’exploitation continue des travailleurs et des ressources naturelles. La doctrine Monroe, énoncée en 1823, allait plus loin, affirmant le droit des États-Unis d’intervenir dans tout pays d’Amérique centrale ou du Sud refusant de soutenir ses politiques. Au XXᵉ siècle, après la Seconde Guerre mondiale et pendant la Guerre froide, les États-Unis ont utilisé la menace communiste pour étendre ce concept à d’autres pays, du Vietnam à l’Indonésie, en passant par l’Afrique du Sud.

Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis deviennent une superpuissance mondiale et fondent la Banque mondiale et le FMI, tous deux intimement liés à la politique américaine. Selon John Perkins, la conquête s’est poursuivie par l’action des « Economic Hit Men » (EHM) qui enferment les gouvernements dans des systèmes économiques néolibéraux par la dette ; si cela échoue, les « Jackals » interviennent par assassinats et coups d’État ; si cela échoue encore, l’armée américaine vient exporter la liberté et la démocratie.

Le communisme : une construction sociale

Engels lui-même écrivait dans Socialism: Utopian and Scientific : « Le socialisme moderne n’est rien d’autre que le reflet mental de ce conflit réel, son idéal dans l’esprit des classes qui en souffrent directement, avant tout la classe ouvrière. » Le socialisme et le communisme sont des constructions sociales nées des injustices plus que de véritables systèmes de croissance économique. Face aux inégalités historiques, il est difficile de ne pas ressentir de l’empathie pour cette cause.

Cependant, l’erreur majeure de la pensée communiste/socialiste réside dans l’idée que le capitalisme est intrinsèquement mauvais. Comme l’explique Patrick Bond (Commanding Heights & Community Control: New Economics for a New South Africa), il faut distinguer l’action des individus (élites, politiques, dirigeants d’entreprise) des structures (capitalisme, néolibéralisme, inégalités raciales, systèmes financiers mondiaux). En ignorant l’agent, l’immoralité humaine disparaît du raisonnement et le système est blâmé à tort.

En Afrique du Sud, les 130 ans de colonialisme et d’apartheid ont exclu les Noirs de l’économie, qui associaient souvent capitalisme et gouvernement. À l’inverse, le communisme était perçu comme l’antithèse de ce système, soutenant la lutte de libération.

Une victoire pour le néolibéralisme

Les modèles politico-économiques américains ont évolué au fil des siècles, alternant périodes d’intervention gouvernementale et laissez-faire. La Grande Dépression des années 1930 a conduit au New Deal, fortement influencé par Keynes, prônant l’intervention de l’État pour stabiliser l’économie et protéger les populations. Ce modèle de « capitalisme social démocratique » s’inspire encore des pays nordiques.

L’économie n’est pas une science dure : elle repose sur le comportement humain et les systèmes sociaux. Pourtant, des théoriciens comme Henry Hazlitt et Milton Friedman ont tenté de la traiter comme telle, instaurant le néolibéralisme qui culminera avec Reaganomics. Le régime Reagan-Thatcher a renforcé le capitalisme de marché libre, s’inscrivant au cœur de la Guerre froide. La chute de l’URSS a marqué l’effondrement du communisme et l’affirmation du capitalisme néolibéral mondial.

L’Amérique s’empare de notre démocratie

À l’aube des années 1990, l’Amérique s’intéresse à l’Afrique du Sud, un portail économique majeur vers le continent. Selon Confessions of an Economic Hit Men et The Shock Doctrine de Naomi Klein, Washington impose une forme subtile de néo-colonisation économique via des politiques néolibérales empêchant toute réelle redistribution, nationalisation, réforme foncière ou industrialisation étatique. C’est, selon Loyiso Mpeta, la raison principale de l’échec de l’ANC face à la pauvreté, au chômage et aux inégalités.

Les élites noires, enrichies par le BEE, ont souvent joué le rôle de « compradors » dans ce système. Quant aux Ruperts, héritiers de l’apartheid, leur influence économique a contribué à maintenir le statu quo, Johann Rupert accompagnant Ramaphosa pour ses intérêts propres plus que ceux du pays.

Ecclésiaste 2:26

Proverbes 13:22

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*Loyiso Mpeta est le fondateur et CEO de Mshindi Bingwa Group Holdings, où il dirige également les activités en tant que Key Individual et Hedge Fund Manager. Visionnaire de la finance, il œuvre à développer des solutions d’investissement innovantes et durables.

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